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VII

ADIEUX AUX RÊVES


 
Que me voulez-vous donc, rêves de ma jeunesse ?
J’ai clos mes yeux lassés à vos illusions.
Est-il un souvenir où mon passé renaisse ?
Non ! j’ai compté les jours par les déceptions.

De vos espoirs mon âme, hélas ! n’est plus hantée ;
Ma force s’est usée en des labeurs ingrats.
Dans l’amer sentiment de ma vie avortée,
Morne, je m’assoupis ; — ne me réveillez pas !

À qui n’a plus la force à quoi sert le courage ?
Pour aimer et souffrir trop longtemps je vécus.
Sans renier mes dieux, j’ai sombré dans l’orage ;
Mais, tendre et fier, mon cœur est avec les vaincus.

Des fleurs qui m’ont déçu j’ai toutes les épines :
Je ne maudirai pas les mains qui m’ont blessé.
Rêves charmants, adieu ! mon esprit en ruines
N’est plus qu’un sol aride où la foudre a passé.