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hache, fit une large coupure dans la peau de la tête de mon frère : il saignait abondamment. Le sang se répandit dans son œil. Il s’écria d’une voix effrayée : « Maman ! je suis mort. Zacharie vient de me tuer. » Toute la maisonnée accourut, plus une voisine tendrement aimée de la famille. On ne s’occupa d’abord que de mon frère. Ma marraine, le grand chirurgien de la famille, lava et pansa la plaie qui n’était pas profonde, heureusement.

Et moi ! que faisais-je pendant ce temps ? Je courus vite aux fondations détruites et me mis en train de refaire ce que j’avais démoli.

Une voix se fit entendre : « Viens ici tout de suite. » Le ton du commandement ne me donnait pas de choix. Je laissai là les fondations encore mal assises. Je m’avançais d’un pas lent, comme un criminel vers la prison, le visage rouge de honte, un doigt entre les dents, les yeux baissés vers la terre d’où je suis sorti et la tête cachée sous un de mes bras. Rendu à la porte, je m’adossai au mur.

« Vite, viens ici », me dit ma sœur. Je ne bougeai pas. Elle me prit le bras et m’amena devant le tribunal de ma mère, ma bonne mère. J’éclatai en sanglots.

« Quelle punition », dit ma mère à sa voisine, « infligerais-tu à un enfant qui a fait un coup pareil ? »

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