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Louisiane, de l’Arkansas, une partie considérable du Missouri et des Florides, presque tout le Texas, et une portion du Mexique. À se partager ce territoire immense, chacun des associés se fût fait un royaume considérable, royaume sans habitants il est vrai, et où n’existait qu’un germe de colonisation ; mais l’état florissant des colonies voisines et la fertilité d’un pays si heureusement situé pouvaient permettre à toute ambition les espérances les plus hardies[1].

Cette charte obtenue, les vues de la compagnie s’agrandirent ; on voulut donner à cet empire un gouvernement qui répondit à la fortune qu’on espérait pour lui dans un prochain avenir. Clarendon n’était plus en Angleterre ; ce fut Ashley Cooper, comte de Shaftesbury, le plus actif et le plus intelligent des associés, qu’on chargea de rédiger pour l’État naissant une constitution parfaite, et qui durât au travers des siècles[2]. C’est là peut-être un des plus anciens exemples de cette erreur contagieuse que nous a transmise le dix-huitième siècle, et qui consiste à rêver des lois éternelles pour des rapports qui changent tous les jours.

Shaftesbury était à cette époque (en 1668) dans la pleine maturité de son génie ; célèbre par son éloquence, son esprit, sa finesse, tout-puissant près du roi dont il avait servi le retour, et joignant à une grande capacité et à une grande fortune une ambition plus grande encore. C’était un de ces hommes comme il en paraît dans les temps de révolution, qui, au travers de tous les bouleversements de choses et d’idées, savent se maintenir à la tête du gouvernement ou de l’opinion ; de ces hommes comme M. de

  1. Bancroft, History of the United States, t. II, chap. XIII, p. 138.
  2. Bancroft, loc. cit., p. 139.