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Muserolle.

Donne-moi un autre vêtement. (Juliette sort. À Gargaret.) Mon ami, je viens d’échapper à la mort… J’étais allé chez Blanche…

Gargaret.

Encore !…

Muserolle.

Pour lui faire mes adieux… Sois tranquille, je n’y retournerai plus !… J’étais là depuis cinq minutes… lorsque nous entendons tout à coup la voix du marquis qui rentrait. C’est un tigre, cet homme-là !… Blanche m’indique du doigt l’escalier de service… je m’y précipite tête baissée… mais ! comme j’ai de grosses chaussures, j’aurais dû les ôter… Le marquis entend mes pas… il se met à ma poursuite en criant : "Arrêtez, monsieur ! arrêtez, si vous n’êtes pas un lâche !…" Naturellement je redouble de vitesse… mais tout à coup… pif ! paf ! pan !… des coups de revolver plein l’escalier !… Il est cousu de revolvers, ce vieux trappeur ! J’entends les balles qui me sifflent aux oreilles… je me baisse, mon pied glisse, je tombe, et crac ! ma redingote se fend… et le revolver marchait toujours… pif ! paf ! pan !… (D’un ton héroïque.) Je me relève, la peur me donne du courage, je repars, je vole, je franchis les corridors, j’enfile la rue, je renverse les passants, j’écrase un chien, je reçois un coup de parapluie, j’arrive ici… et me voilà !

Gargaret.

Quel drame !

Juliette, revenant avec un vêtement.

L’habit de Monsieur.

Muserolle, le prenant.

Merci. (Juliette sort. Otant sa redingote et remettant l’habit.) Dis-moi… je ne suis pas blessé ?