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J’irai plus loin. Je montrerai que ce caractère religieux, inhérent aux jouets, et surtout aux jouets anthropomorphes, est reconnu d’une manière implicite, non seulement par tous les enfants, mais encore par quelques adultes, en qui persiste la simplicité de l’enfance. Les personnes qui veulent bien me lire savent mon respect pour les choses sacrées. Je puis dire, sans crainte d’être soupçonné par elles d’une irrévérence inattendue, que des simulacres tout à fait puérils prennent place encore aujourd’hui dans certaines cérémonies de l’Église, et que parfois les âmes innocentes et pieuses associent naïvement de purs joujoux aux mystères du culte. Les boutiques de la rue Saint-Sulpice ne sont-elles pas pleines de poupées liturgiques ? Et qu’est-ce que les crèches qu’on met dans les églises, pendant les joyeuses féeries de Noël, sinon de pieux jouets ? Il n’y a pas huit jours, comme j’entrais dans une chapelle ouverte par les catholiques anglais dans le quartier de l’Étoile, je vis, au fond de l’abside, la scène de la Nativité, représentée par des figurines moulées et peintes. De douces femmes venaient s’agenouiller devant ces bonshommes. Elles reconnaissaient avec allégresse la grotte de Bethléem, la sainte Vierge, saint Joseph et le petit Jésus, ouvrant, de son berceau, les bras sur le monde. Prosternés aux pieds de l’Enfant-Dieu, les trois rois mages présentaient l’or, la myrrhe et l’encens. On distinguait Melchior à sa barbe blanche, Gaspar à son air de jeunesse, et le bon Balthazar à l’expression naïve de son visage noir comme la nuit. Celui-là souriait sous un énorme turban. O candeur