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comme un charme à la nature morale de Delphine. Conformément à la destinée des grandes amoureuses, la fille de madame de Sabran était vouée à la solitude.

Delphine épousa, en 1787, le jeune Philippe de Custine, fils du général. Elle avait dix-huit ans. Les noces se firent à la campagne, chez Mgr de Sabran, oncle de la mariée. Il y eut huit jours de fêtes rustiques. Madame de Sabran raconte qu’à une de ces fêtes, « des lampions couverts comme à Trianon donnaient une lumière si douce et des ombres si légères que l’eau, les arbres, les personnes, tout paraissait aérien » . La lune avait voulu être aussi de la fête ; elle se réfléchissait dans l’eau et « aurait donné à rêver aux plus indifférents » . Et madame de Sabran ajoute : « De la musique, des chansons, une foule de paysans bien gaie et bien contente suivait nos pas, se répandait ça et là pour le plaisir des yeux. Au fond du bois dans l’endroit le plus solitaire, était une cabane, humble et chaste maison. La curiosité nous y porta, et nous trouvâmes Philémon et Baucis courbés sous le poids des ans et se prêtant encore un appui mutuel pour venir à nous. Ils donnèrent d’excellentes leçons à nos jeunes époux, et la meilleure fût leur exemple. Nous nous assîmes quelque temps avec eux et nous les quittâmes attendris jusqu’aux larmes. »

Il y a là un sentiment nouveau de la nature. Toutes ces belles dames étaient un peu filles de Jean-Jacques. La bergerie à la veille de la Terreur. Trois ans après, le vieux général de Custine était traduit devant le tribunal