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LES TORTS DE L’HISTOIRE[1]

Les philosophes, ont, en général peu de goût pour l’histoire. Ils lui reprochent volontiers de procéder sans méthode et sans but. Descartes la tenait en mépris. Malebranche disait n’en pas faire plus de cas que des nouvelles de son quartier. Dans sa vieillesse, il distinguait le jeune d’Aguesseau et le favorisait même de quelques entretiens sur la métaphysique ; mais un jour, l’ayant surpris un Thucydide à la main, il lui retira son estime : la frivolité de cette lecture le scandalisait. Avant-hier encore, étant assez heureux pour causer avec un philosophe dont l’entretien m’est toujours profitable, M. Darlu, j’eus grand’peine à défendre contre lui l’histoire, qu’il tient pour la moins honorable des œuvres d’imagination.

Aussi n’ai-je pas éprouvé trop de surprise en ouvrant,

  1. L’Histoire et les Historiens, essai critique sur l’histoire considérée comme science positive, par Louis Bourdeau. 1 vol. in-8o ; Alcan, éditeur.