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Ô mort des anciens jours, j’ai compris ta douceur,
Le charme évanoui de ton œuvre muette,
Lorsqu’insensiblement tu couvrais de pâleur
Un profil corinthien de vierge ou de poète.

Le calme transpirait sur le front déserté,
Du sourire perdu la grâce était plus molle,
Tout le corps endormi flottait en liberté :

On eût dit une fleur qui distend sa corolle,
Tandis que de sa bouche une abeille s’envole,
Emportant ses parfums et non pas sa beauté.

Le Louvre possède une bonne réplique du Génie funèbre et, devant ce bel immortel endormi dans la mort, je me suis plus d’une fois répété le sonnet païen de Saint-Cyr de Rayssac. Le poète a bien traduit, ce me semble, la pensée antique : dormir, mourir. La mort n’est qu’un sommeil sans fin.

Ce n’est point que la mort fût charmante en soi chez les Grecs. La mort fut de tout temps hideuse et cruelle. On aura beau dire qu’il ne faut pas la craindre et qu’être mort, c’est seulement ne pas être, l’homme répondra que l’idée de la dernière heure est pleine d’affres et d’épouvantes. Les Grecs aussi craignaient la mort. Du moins, ils ne l’enlaidissaient pas ; loin de là. L’imagination hellénique embellissait toutes choses et donnait même de la grâce à l’évanouissement suprême. Le moyen âge, au contraire, nous a effrayés par la peur de l’enfer, par une lugubre fantasmagorie de diables happant au passage l’âme du pécheur, par les simulacres funèbres des sépulcres, par les images des squelettes et des vers du cercueil rongeant la chair corrompue,