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LE CHEVALIER DE FLORIAN.

let 1794 : « On nous a amené ce matin un homme bien estimable, le chevalier de Florian, auteur de Numa, d’Estelle, etc. » Trois jours après, les détenus se réunirent, le soir, pour entendre un des leurs chanter une chanson du nouveau venu, dont ils s’honoraient d’être les compagnons d’infortune. Il ne paraît pas que Florian se soit associé à ces pâles fêtes de la captivité. On ne dit pas qu’il s’entretint avec les femmes galamment vêtues ni qu’il s’assit, la nuit, sous l’acacia. D’ailleurs, sa détention fut de courte durée. Il sortit de la Bourbe peu de jours après le 9 Thermidor. De retour dans sa chère retraite de Sceaux, il ne put retrouver en lui-même la paix qui l’environnait. La fièvre le consumait. À chaque coup frappé à sa porte, son imagination troublée lui figurait des patriotes armés de piques venus pour l’arrêter. Il languit ainsi quelques semaines et mourut le 29 fructidor an II (15 septembre 1794), à l’âge de trente-huit ans. Peu de mois après, mademoiselle Sophie Le Sénéchal se maria avec un homme obscur et riche, et, quatre ans plus tard, Rose Gontier épousa son camarade Allaire.

Tel est le véritable Florian. Il battait sa maîtresse, et il n’épousa pas mademoiselle Sophie. Mais l’ombre d’Estelle sourit encore sur sa tombe dans le cimetière du village où il repose.