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LE MUSÉON.

Nous sommes, à la vérité, dans des ténèbres si profondes qu’il est malaisé, non de formuler des hypothèses, car elles se présentent en foule, mais de s’attacher à une hypothèse déterminée. La pensée de Minayeff, et, nous le verrons en examinant l’histoire de Vaiçālī, cette pensée paraît très prudente et judicieuse, c’est que les règles de discipline, à la mort du Maître, étaient très loin d’être fixées telles que nous les connaissons. Pour être moine bouddhiste, il fallait tout d’abord être un religieux, un çramaṇa, c’est-à-dire se conformer aux lois générales de la vie religieuse, déjà précisée sous diverses formes, jainas ou brahmaniques ; il fallait aussi être un « fils de Çākya », en se soumettant à la forme particulière de vie religieuse que l’expérience toujours accrue du Maître, puis de la Communauté, jugera bon de formuler ; en faisant partie du saṁgha, présidé par le Bouddha et constitué en fraternités amies.

Or le Bouddha a reconnu lui-même l’inutilité et la nocivité de la pénitence (tapas) ; le tableau qu’il trace des « fruits de la vie religieuse » n’a rien d’effrayant ; sa première parole officielle est pour annoncer, — c’est à des religieux, à des yogins qu’il s’adresse, — une voie moyenne entre l’austérité et le « laxisme »[1].

Dès lors une solution se présente, à la vérité séduisante, et qu’on peut recommander à l’école conservatrice. Quand le Bouddha permit de supprimer les khuddakānukhuddakas, il n’entendait pas parler des principes par lui-même proclamés, lois de « l’honnête religieux » qui sait vivre et marche à grands pas, en suivant l’Octuple

  1. Voir les remarques de M. Rhys Davids (Dialogues of the Buddha, p. 208), sur le Kassapasīhanāda.