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19je ne mérite plus d’être appelé ton fils : traite-moi comme l’un de tes mercenaires.

20Et il se leva et il alla vers son père. Comme il était encore loin, son père le vit, et, tout ému, il accourut, se jeta à son cou, et le couvrit de baisers. 21Son fils lui dit : Mon père, j’ai péché contre le ciel et envers toi ; je ne mérite plus d’être appelé ton fils. 22Mais le père dit à ses serviteurs : Apportez la plus belle robe et l’en revêtez ; mettez-lui un anneau au doigt et des souliers aux pieds. 23Amenez aussi le veau gras et tuez-le ; faisons un festin de réjouissance : 24car mon fils que voici était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé. Et ils se mirent à faire fête.

25Or, le fils aîné[1] était dans les champs ; comme il revenait et approchait de la maison, il entendit de la musique et des danses. 26Appelant un des serviteurs, il lui demanda ce que c’était. 27Le serviteur lui dit : Votre frère est arrivé, et votre père a tué le veau gras, parce qu’il l’a recouvré sain et sauf. 28Mais il se mit en colère, et ne voulut pas entrer. Le père sortit donc, et se mit à le prier. 29Il répondit à son père : Voilà tant d’années que je te sers, sans avoir jamais transgressé tes ordres, et jamais tu ne m’as donné, à moi, un chevreau pour festoyer avec mes amis. 30Et quand cet autre fils, qui a dévoré ton bien[2] avec des courtisanes, arrive, tu tues pour lui le veau gras ! 31Le père lui dit : Toi, mon fils, tu es toujours avec moi, et tout ce que j’ai est à toi. 32Mais il fallait bien faire un festin et se réjouir, parce que ton frère que voilà était mort, et qu’il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé.”


3. Contre l’avarice : L’économe infidèle ; Dieu et l’argent (xvi, 1-13). Reproches aux Pharisiens ; mariage indissoluble (14-18). Le mauvais riche et Lazare (19-31). Le scandale ; la correction fraternelle ; la foi; serviteurs inutiles (xvii, 1-10).

Jésus disait aussi à ses disciples : “Un homme riche avait un économe qu’on accusa devant lui de dissiper ses biens. 2Il l’appela et lui dit : Qu’est-ce que j’entends dire de toi ? Rends compte de ton administration : car désormais tu ne pourras plus gérer mes biens. 3Alors l’économe dit en lui-même : Que ferai-je, puisque mon maître me retire la gestion de ses biens ? Travailler la terre, je n’en ai pas la force, et j’ai honte de mendier. 4Je sais ce que je ferai, afin que, lorsqu’on m’aura ôté mon emploi, il y ait des gens qui me reçoivent dans leurs maisons. 5Faisant donc venir l’un après l’autre les débiteurs de son maître, il dit au premier : Combien dois-tu à mon maître ? 6Il répondit : Cent barils[3] d’huile. L’économe lui dit : Prends ton billet : assieds-toi vite, et écris cinquante. 7Ensuite il dit à un autre : Et toi, combien dois-tu ? Il répondit : Cent mesures[4] de froment. L’économe lui dit : Prends ton billet, et écris quatre-vingts. 8Et le maître[5] loua l’économe infidèle d’avoir agi habilement ; car les enfants de ce siècle sont plus habiles entre eux que les enfants de la lumière. 9Moi aussi je vous dis : Faites-vous des amis avec les richesses d’iniquité, afin que, lorsque vous quitterez la vie, ils vous reçoivent dans les tabernacles éternels.

10Celui qui est fidèle dans les petites choses, est fidèle aussi dans les grandes, et celui qui est injuste dans les petites choses, est injuste aussi dans les grandes. 11Si donc vous n’avez pas été fidèles dans les richesses d’iniquité, qui vous confiera les biens véritables ? 12Et si vous n’avez pas été fidèles dans un bien étranger, qui vous donnera votre bien propre ? 13Nul serviteur ne peut servir deux maîtres ; car ou il haïra l’un et aimera l’autre, ou il s’attachera à l’un et méprisera l’autre. Vous ne pouvez servir Dieu et la Richesse.”

14Les Pharisiens qui aimaient l’argent, écoutaient aussi tout cela, et se moquaient de lui.[6] 15Jésus leur dit : “Vous êtes ceux qui se font passer pour justes devant les hommes ; mais Dieu connaît vos cœurs ; et ce qui est élevé aux yeux des hommes est une abomination devant Dieu.[7]

16La Loi et les prophètes vont jusqu’à Jean ; depuis Jean, le royaume de Dieu est annoncé, et chacun fait effort pour y entrer.[8]

  1. 25. Le fils aîné : de même que l’enfant prodigue représente les publicains et les pécheurs convertis qui se pressaient en foule autour de Jésus (vers. 1), ainsi son frère aîné figure les Pharisiens et les Scribes, ces orgueilleux adversaires du Sauveur, que scandalisait (v. 2.) sa miséricordieuse bienveillance pour ces pécheurs qu’ils méprisaient (xviii, 9 sv.)
  2. 30. Ton bien. Vulg. son bien.
  3. XVI, 6. Barils, propr. bats ou baths. Le bath hébreu contenait près de 40 litres.
  4. 7. Mesures, propr. cors. Le cor contenait 10 éphis ou baths, soit environ 390 litres.
  5. 8. Le maître : le propriétaire lésé loua, non les actes frauduleux, mais l’habileté de l’économe, en disant p. ex. : Voilà un habile homme !
  6. 14. Matth. xix, 3 ; Marc, x, 2.
  7. 15. Matth. xxiii, 25-28.
  8. 16. Effort pour y entrer. L’intention du divin Maître semble être de reprocher aux Pharisiens leur orgueilleuse abstention, en lui opposant l’empressement des âmes de bonne volonté à venir entendre, soit le Précurseur (Matth. iii, 5), soit le Messie lui-même (Luc, xii, 1 ; Jean, ii, 19). Comp. Matth. xi, 10. — D’autres : tous y sont poussés comme de force.