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25Car celui qui voudra sauver sa vie, la perdra ; et celui qui perdra sa vie à cause de moi, la trouvera. 26Et que sert à un homme de gagner le monde entier, s’il vient à perdre son âme ? Ou que donnera un homme en échange de son âme ? 27Car le Fils de l’homme doit venir dans la gloire de son Père avec ses anges, et alors il rendra à chacun selon ses œuvres.[1]28Je vous le dis en vérité, plusieurs de ceux qui sont ici présents ne goûteront point la mort, qu’ils n’aient vu le Fils de l’homme venant dans son règne.”



Six jours après, Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et Jean son frère, et les conduisit à l’écart sur une haute montagne.[2]2Et il fut transfiguré devant eux : son visage resplendit comme le soleil, et ses vêtements devinrent blancs comme la lumière[3]. 3Et voilà que Moïse et Élie leur apparurent conversant avec lui.[4]4Prenant la parole, Pierre dit à Jésus : “Seigneur, il nous est bon d’être ici ; si vous le voulez, faisons-y[5] trois tentes, une pour vous, une pour Moïse et une pour Élie.” 5Il parlait encore, lorsqu’une nuée lumineuse les couvrit, et du sein de la nuée une voix se fit entendre, disant : “Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai mis toutes mes complaisances : écoutez-le.” 6En entendant cette voix, les disciples tombèrent la face contre terre, et furent saisis d’une grande frayeur. 7Mais Jésus, s’approchant, les toucha et leur dit : “Levez-vous, ne craignez point.” 8Alors, levant les yeux, ils ne virent plus que Jésus seul. 9Comme ils descendaient de la montagne, Jésus leur fit ce commandement : “Ne parlez à personne de cette vision, jusqu’à ce que le Fils de l’homme soit ressuscité des morts.”

10Ses disciples l’interrogèrent alors, et lui dirent : “Pourquoi donc les Scribes disent-ils qu’il faut qu’Élie vienne auparavant ?”[6]11Il leur répondit : “Élie doit venir, en effet, et rétablir toutes choses. 12Mais je vous le dis, Élie est déjà venu ; ils ne l’ont pas connu, et ils l’ont traité comme ils ont voulu : ils feront souffrir de même le Fils de l’homme.” 13Les disciples comprirent alors qu’il leur avait parlé de Jean-Baptiste.

14Jésus étant retourné vers le peuple, un homme s’approcha, et, tombant à genoux devant lui, il lui dit : “Seigneur, ayez pitié de mon fils qui est lunatique et qui souffre cruellement ; il tombe souvent dans le feu et souvent dans l’eau.[7]15Je l’ai présenté à vos disciples, et ils n’ont pas su le guérir.” 16Jésus répondit : “O race incrédule et perverse, jusques à quand serai-je avec vous ? Jusques à quand vous supporterai-je ? Amenez-le-moi ici.” 17Et Jésus commanda au démon avec menace, et le démon sortit de l’enfant, qui fut guéri à l’heure même. 18Alors les disciples vinrent trouver Jésus en particulier, et lui dirent : “Pourquoi n’avons-nous pas pu le chasser ?” 19Jésus leur dit : “A cause de votre manque de foi. En vérité, je vous le dis, si vous avez de la foi comme un grain de sénevé, vous direz à cette montagne : Passe d’ici là, et elle y passera, et rien ne vous sera impossible. 20Mais ce genre de démon n’est chassé que par le jeûne et la prière.”

  1. 27-28. Le vers. 27 désigne clairement le second avènement de J.-C., en qualité de juge suprême de tous les hommes, à la fin du monde. De quel avènement du Fils de Dieu s’agit-il au vers. 28 ? Deux circonstances le caractérisent : plusieurs des contemporains de Jésus le verront, et lui-même y signalera sa souveraine puissance, comme il est dit en S. Marc, viii, 39. Il s’agit de la ruine de Jérusalem et du judaïsme, à laquelle correspond l’établissement du christianisme dans les principales contrées de l’univers. Ce grand fait peut être considéré comme le premier acte de la puissance suprême du Roi-Messie, juge du monde, dans le grand drame de l’histoire de son royaume. Ce jour-là, quoique invisible, on peut dire qu’il est venu, puisqu’il a fait fonction de juge souverain. Le dernier acte du drame, dont le premier est comme la figure, s’accomplira à la fin des temps.
  2. XVII, 1. Marc, ix, 1, 9; Luc, ix, 28-36. Montagne : une tradition, qui remonte à S. Cyrille de Jérusalem et à S. Jérôme, désigne le mont Thabor, situé à 2 lieues au S. E. de Nazareth. Cependant le P. Patrizzi et beaucoup d’exégètes modernes opposent à ce sentiment de fortes raisons : ils indiquent une des cimes du grand Hermon, beaucoup plus au nord, et voisin de Césarée de Philippe.
  3. 2. Vulg., blancs comme la neige.
  4. 3. La transfiguration de Jésus est le point culminant de sa vie publique, comme le baptême en est le point de départ. Pour la seconde fois, Dieu le Père le reconnaît pour son Fils unique et bien-aimé. Tandis que le faux judaïsme le repousse, le judaïsme véritable, dans la personne de ses plus augustes représentants, Moïse et Élie, c’est-à-dire la Loi et les Prophètes, le reconnaît et l’adore. L’ancienne Alliance et la Nouvelle se rejoignent sur le mont glorieux, comme la justice et l’amour s’uniront sur une autre colline, qui est déjà à l’horizon de Jésus. (S. Chrys.)
  5. 4. Faisons-y. D’autres manuscrits, j’y ferai (dresserai).
  6. 10. Marc, ix, 10-12.
  7. 14. Marc, ix, 13-26 ; Luc, ix, 37-43.