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7Après cela je regardais dans les visions de la nuit, et voici une quatrième bête[1], terrible, effrayante et extraordinairement forte ; elle avait de grandes dents de fer ; elle dévorait et brisait, et le reste elle le foulait aux pieds ; elle était différente de toutes les bêtes qui l’avaient précédée, et elle avait dix cornes. 8Je considérais les cornes, et voici qu’une autre corne, petite[2], s’éleva au milieu d’elles, et trois des premières cornes furent arrachées par elle ; et voici que cette corne avait des yeux comme des yeux d’homme, et une bouche qui disait de grandes choses.

9Je regardais, jusqu’au moment où des trônes furent placés, et où un vieillard s’assit[3]. Son vêtement était blanc comme de la neige, et les cheveux de sa tête étaient comme de la laine pure. Son trône était des flammes de feu ; les roues, un feu ardent. 10Un fleuve de feu coulait, sortant de devant lui ; mille milliers le servaient, et une myriade de myriades se tenaient debout devant lui. Le Juge s’assit, et des livres furent ouverts[4]. 11Je regardais alors, à cause du bruit des grandes paroles que la corne proférait ; je regardais, jusqu’au moment où la bête fut tuée, et son corps détruit et livré à la flamme de feu. 12Au reste des bêtes aussi, on avait ôté leur domination, et la durée de leur vie avait été fixée jusqu’à un temps et un moment.

13Je regardais dans les visions de la nuit, et voici que sur les nuées vint comme un Fils d’homme[5] ; il s’avança jusqu’au vieillard, et on le fit approcher devant lui. 14Et il lui fut donné domination, gloire et règne, et tous les peuples, nations et langues le servirent. Sa domination est une domination éternelle qui ne passera point, et son règne ne sera jamais détruit.[6]

15Pour moi, Daniel, mon esprit fut troublé au dedans de moi[7], et les visions de ma tête m’effrayèrent. 16Je m’approchai vers l’un de ceux qui se tenaient , et je lui demandai quelque chose de certain sur tout cela, et il me parla pour m’en donner l’explication. 17Ces grandes bêtes, qui sont quatre, ce sont quatre rois qui s’élèveront de la terre ; 18mais les Saints[8] du Très-Haut recevront le royaume, et ils posséderont le royaume pour l’éternité, pour une éternité d’éternités.

19Alors je voulus avoir une certitude sur la quatrième bête qui était différente de toutes les autres, extrêmement terrible, dont les dents étaient de fer et les griffes d’airain, qui mangeait, brisait et foulait aux pieds ce qui restait ; 20et sur les dix cornes qui étaient sur sa tête, et sur l’autre corne qui s’était élevée et devant laquelle trois étaient tombées, cette corne qui avait des yeux et une bouche proférant de grandes choses, et qui paraissait plus grande que ses compagnes. 21Je regardai, et cette corne faisait la

  1. 7. Une quatrième bête, symbole de la quatrième monarchie universelle, de l’empire romain, caractérisé par le fer, comme dans la statue du chapitre ii, 33-40. — Dix cornes (comp. Apoc. xvii, 7, 12) c. — à-d. dix rois (vers. 24), en prenant ce mot dans le sens de royaumes, qu’il a souvent (ii, 44) ; elles correspondent aux dix orteils de la statue (ii, 33, 41) Elles signifient la multitude d’Etats auxquels donna naissance la dissolution de l’empire romain.
  2. 8. Une petite corne : puissance de peu d’apparence, mais dans laquelle semblent se concentrer toute la force de la quatrième bête et son hostilité contre Dieu. — Les trois cornes arrachées par elle (litt. de devant elle), signifient probablement que plusieurs des États sortis de la quatrième monarchie se soumettront à la petite corne et accroîtront ainsi son pouvoir. — Des yeux d’homme, une bouche, semblent indiquer que cette puissance hostile à Dieu se personnifiera dans un individu habile et clairvoyant. L’interprétation traditionnelle l’identifie avec l’Antéchrist, dont l’apparition doit précéder le glorieux avènement du Messie (II Thess. i, 10). — D’autres interprètes voient dans le quatrième animal l’empire gréco-macédonien et le royaume de Syrie (ceux qui identifient le troisième animal avec l’empire macédonien voient dans le quatrième le royaume de Syrie traité à part). Les dix cornes sont les trois généraux et les sept rois qui précédèrent Antiochus Epiphane, identifié avec la petite corne comme au chap. viii. Dom Calmet a soutenu cette opinion.
  3. 9. Des trônes furent placés, litt. jetés du ciel ; ce n’est ni dans le ciel ni sur la terre, mais entre ciel et terre que le jugement paraît se passer. — Un vieillard, litt. un avancé de jours, le Dieu éternel (comp. I Tim, i, 17 ; Apoc. i, 14-17), représenté sous les traits d’un vieillard. — S’assit pour juger, entouré d’autres juges, ses assesseurs, appelés plus loin les saints du Très-Haut, c.-à-d. les esprits célestes.
  4. 10. Le juge s’assit, litt. judicium sedit, que plusieurs traduisent, le tribunal, celui qui préside et ses assesseurs ; d’autres, avec plus de raison peut-être, il s’assit pour jugerDes livres, où toutes les actions des hommes sont écrites.
  5. 13. Un fils d’homme. La tradition a vu dans ce Fils d’homme le Messie ; lui-même, sans doute par allusion à ce passage, s’est attribué spécialement le titre de Fils de l’homme ; Matth. i, viii, 20 ; xxiv, 30 et surtout xxvi, 64.
  6. 14. Dans ce tableau, comme souvent dans les tableaux prophétiques, la première venue du Sauveur pour l’établissement du royaume messianique se confond avec sa seconde venue pour la consommation de ce règne.
  7. 15. Au dedans de moi ; litt., dans sa gaine.
  8. 18. Les saints, tout le peuple théocratique. Le Messie n’est pas séparé de son peuple ; tous ses sujets nous apparaissent associés à sa royauté et partageant sa gloire.