Page:La Saga du scalde Egil Skallagrimsson, trad. Wagner, 1925.djvu/79

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 49 —

part du roi une réconciliation basée sur la contrainte. Dites-lui de nous accorder libre sortie ; pour le reste, laissons la destinée décider de notre sort. » Ölvir retourna chez le roi et lui fit part des vœux de Thorolf. Le roi dit : « Que l’on mette le feu à la salle ! Je ne veux pas lutter dans ces conditions et voir périr mes hommes. Je sais que Thorolf nous infligerait de grandes pertes. Si nous devons l’attaquer là, il nous faudra du temps pour en venir à bout, bien que ses troupes soient moins fortes que les nôtres. »

On mit donc le feu à la salle. Elle flamba rapidement, attendu que la charpente était sèche, le bois enduit de goudron et la toiture recouverte d’écorces de bouleau. Thorolf ordonna à ses gens de démolir la cloison en planches qui séparait de la salle la place de devant, ce qui fut rapidement exécuté. Quand ils parvinrent à la charpente, le plus grand nombre possible d’entre eux saisirent la grosse poutre et la poussèrent par l’autre extrémité contre un des coins de la salle avec tant de violence que les entailles du bout se brisèrent ; les parois s’écroulèrent, ouvrant ainsi une large brèche. Thorolf passa le premier, puis Gjallandi et ainsi tous l’un après l’autre. Ensuite la lutte s’engagea. Elle dura un certain temps, parce que la salle couvrait les derniers rangs de la troupe de Thorolf. Mais lorsque le bâtiment se mit à brûler, le feu les atteignit et ils périrent en grand nombre. À ce moment Thorolf se précipita en avant et, frappant des deux côtés, pénétra jusqu’à l’endroit où se trouvait l’étendard royal. Alors tomba Thorgils Gjallandi. Parvenu devant le « rempart des boucliers[1] », Thorolf transperça de son épée le porte-enseigne et s’écria : « Il ne me restait plus que trois pas à faire ! »

Les coups d’épée et de lance l’accablèrent à la fois, et le roi lui-même lui porta le coup mortel. Thorolf s’abattit aux pieds du roi. Celui-ci fit proclamer l’ordre de cesser le massacre, ce que l’on fit. Ensuite il invita ses hommes à rejoindre le bateau. Parlant à Ölvir et à Eyvind, il dit : « Prenez maintenant Thorolf, votre parent, et faites-lui des funérailles honorables,

  1. Pendant le combat, les amis du roi et quelques-uns de ses plus vaillants guerriers faisaient cercle autour de lui, pour lui constituer un rempart de leurs boucliers.