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traînèrent en longueur. Au moment de prendre la mer, le vent lui fut contraire ; l’automne s’annonçait et les tempêtes sévissaient plus fort. On côtoya les Orkneyjar au nord. Egil ne voulait pas y aborder, parce qu’il avait dans l’idée que l’autorité d’Eirik s’étendait sur tout le territoire des îles. Ils firent donc voile vers le sud dans la direction de l’Écosse, luttant contre de fortes tempêtes et un vent défavorable. Sur les côtes d’Écosse, et tout le long du trajet jusqu’en Angleterre, ils eurent le vent en face.

Un soir, alors qu’il commençait à faire obscur, ils remarquèrent subitement, par un temps âpre, que, sur les deux côtés et devant eux, des vagues déferlaient sur des récifs. Ils n’eurent d’autre ressource que de s’approcher des terres, et c’est ce qu’ils firent. Ils avancèrent et atteignirent l’embouchure de la Humra[1], au moment où le naufrage se produisit. Tout l’équipage et la plus grande partie des biens furent sauvés ; mais il n’en fut pas de même du bateau, qui se trouva réduit en pièces. Ayant interpellé des gens, ils apprirent des choses qui parurent à Egil peu rassurantes, à savoir que le roi Eirik Blodöx vivait là avec Gunnhild, qu’ils détenaient le gouvernement du pays et qu’Eirik se trouvait non loin de là, dans la place forte de Jorvik. On lui fit savoir aussi que le hersir Arinbjörn était auprès du roi et qu’il jouissait de sa grande faveur. Quand il eut acquis la certitude de ce que l’on racontait, Egil se demanda ce qu’il fallait faire. Il n’entrevoyait guère d’espoir d’échapper, quand même il essayerait de se cacher et d’entreprendre sous un déguisement le long trajet qu’il faudrait faire pour sortir du royaume d’Eirik. Il était facilement reconnaissable pour quiconque l’apercevrait, et il jugeait qu’il serait peu digne de se voir arrêté au beau milieu de sa fuite. Mais il reprit courage et résolut de se procurer un cheval, la nuit même où il avait échoué là, et de se rendre immédiatement à la place forte. Il y arriva dans la soirée et entra aussitôt dans la place. Au-dessus du casque il avait jeté une cape et il était compètement armé. Il demanda où était située la

    qu’une compensation pour son frère Thorolf, tué au service du roi. (cf. ch. 55).

  1. Le Humber.