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qu’Ölvir eut à entreprendre une tournée en vue de faire rentrer les contributions foncières dues à Thorir et qui n’avaient pas été payées au printemps. Il avait une barque à rames que montaient une douzaine de serviteurs de Thorir. Or, en ce moment Egil se rétablissait et se retrouvait sur pied. Il éprouvait quelque regret à rester à la maison, alors que tout le monde était parti. Dans une conversation qu’il eut avec Ölvir, il lui fit part de son désir de s’embarquer avec lui. Ölvir estima qu’un compagnon de valeur n’était pas de trop, d’autant plus que dans l’embarcation il y avait de la place en abondance : Egil fit ses préparatifs, emportant avec lui, comme armes, une épée, une lance et un bouclier. Les apprêts terminés, on se mit en route. Ils subirent une succession de violentes tempêtes ; le temps était âpre et la situation pénible. Ce fut un trajet plein de difficultés. Ils durent se servir des rames et le bateau se remplissait d’eau. Le voyage se poursuivit ainsi, et au soir ils arrivèrent à l’île Atley où ils abordèrent. Dans cette île se trouvait, ron loin du rivage, une ferme appartenant au roi Eirik et exploitée par un homme du nom de Bard. On l’appelait Atleyjar-Bard[1]. C’était un administrateur de talent et un énergique travailleur ; sans être de grande famille, il jouissait de la sympathie du roi Eirik et de la reine Gunnhild. Les gens d’Ölvir traînèrent leur bateau hors de l’endroit envahi par le flux et se rendirent à la ferme. Ils rencontrèrent Bard à l’extérieur, contèrent les émotions de leur voyage et exprimèrent le désir de passer la nuit en ce lieu. Bard, voyant qu’ils étaient tout mouillés, les conduisit dans une place chauffée, isolée des autres appartements et fit faire pour eux un grand feu. Là ils séchèrent leurs vêtements. Quand ils se furent rhabillés, Bard s’approcha. « Nous allons, » dit-il, « vous servir ici un repas ; je sais que vous devez avoir envie de dormir ; vous êtes épuisés par l’effort. » Ölvir approuva cette idée. On dressa donc des tables et on leur présenta de la nourriture, du pain et du beurre, et l’on servit de grands vases de lait caillé[2]. Bard dit : « Il est hautement regrettable qu’il n’y ait

  1. C’est-à-dire Bard l’Insulaire d’Atleö.
  2. L’habituelle nourriture lactée. Ce skyr, qui gagne à vieillir, est aujourd’hui encore le plat national des Islandais. « Ce n’est ni plus ni