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Toutes ces choses aigrissaient Monsieur le Prince, mais elles ne lui faisaient rien soupçonner de ce qui était près d’éclater contre lui ; et bien qu’il fût mal satisfait du Cardinal, il ne prenait aucunes mesures pour le perdre, ni pour s’empêcher que le Cardinal lui-même ne le perdît[1] ; et il est certain que, jusques à sa prison, jamais sujet ne fut plus soumis à l’autorité du Roi, ni plus dévoué aux intérêts de l’État ; mais son malheur et celui de la France[2] le contraignirent bientôt à changer de sentiments.

Le traité de mariage du duc de Mercœur, fils aîné du duc de Vendôme, avec une des nièces du cardinal Mazarin, en fut une des principales causes et renouvela toute l’aigreur qui semblait être assoupie entre ce ministre et Monsieur le Prince. Il y avait donné les mains avant la guerre de Paris, soit qu’il n’en eût pas prévu les suites, ou que, par déférence pour la Reine, il n’eût osé lui témoigner qu’il les prévoyait[3]. Mais enfin Mme de Longueville, ennemie de la maison de Vendôme, craignit que les prétentions de rang du duc de Longueville ne fussent troublées par l’élévation du duc de Mercœur. Elle se servit[4] des premiers moments de sa réconciliation avec Monsieur le Prince pour lui faire

    Poitou, racheté au prix de trois cent mille livres par la Rochefoucauld ? Voyez ci-dessus, p. 96 et note 7, et ci-après l’Apologie.

  1. Il ne prenoit aucune mesure pour le perdre ni pour empêcher qu’il ne le perdit. (Ms. H, réd. 2.) — *I1 ne prenoit toutefois aucune mesure pour le perdre ni pour s’empêcher d’être perdu. (Ms. H, réd. i.)
  2. * Mais le malheur de la France et le sien propre. (Ms. H. réd. 1.) — Rapprochez de l’Oraison funèbre de Condé par Bossuet : « Il disoit, en parlant de cette prison malheureuse, qu’il y étoit entré le plus innocent des hommes, etc »
  3. * Ou que, par une trop grande déférence pour la cour, il n’eût osé témoigner à la Reine qu’il les prévoyoit. (Ms. H, réd. 1 et 2.)
  4. *Et craignant que les prétentions du rang..., se servit, etc. (Ms. H, réd. i et 2.)