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tentèrent inutilement cette voie, et mêlèrent d’autres sentiments à ceux de l’ambition[1]. Miossens[2], qui depuis a été maréchal de France, s’y opiniâtra le plus longtemps, et il eut un pareil succès. J’étais de ses amis particuliers, et il me disait ses desseins ; ils se détruisirent bientôt d’eux-mêmes ; il le connut, et il me dit plusieurs fois qu’il était résolu d’y renoncer ; mais la vanité, qui était la plus forte de ses passions, l’empêchait souvent de me dire vrai, et il feignait des espérances qu’il n’avait pas et que je savais bien qu’il ne devait pas avoir. Quelque temps se passa de la sorte, et j’eus enfin sujet de croire que je pourrais faire un usage plus considérable que Miossens de l’amitié et de la confiance de Mme de Longueville[3]. Je l’en fis convenir lui-même ; il savait l’état où j’étais à la cour ; je lui dis mes vues, mais que sa considération me retiendrait toujours, et que je n’essayerais point de prendre[4] des liaisons avec Mme de Longueville, s’il ne m’en laissait la liberté. J’avoue même que je l’aigris exprès contre elle, pour

    vants, 1854, p. 624) — Voyez aussi les Mémoires de Retz, tome II, p. 118 et 119.

  1. Entre autres Retz : voyez ci-après, p. 107, note 2.
  2. Voyez p. 66, note 3.
  3. Mme de Motteville (tome I, p. 334 et 335) dit qu’en s’attachant à Monsieur le Prince par politique, le prince de Marcillac « s’étoit donné à Mme de Longueville d’une manière un peu plus tendre, joignant les sentiments du cœur à la considération de sa grandeur et de sa fortune. Ce don parut tout entier aux yeux du public ; et il sembla à toute la cour que cette princesse le reçut avec beaucoup d’agrément. Dans tout ce qu’elle a fait depuis, on a connu clairement que l’ambition n’étoit pas la seule qui occupoit son âme, et que les intérêts du prince de Marcillac y tenoient une grande place. Elle devint ambitieuse pour lui ; elle cessa d’aimer le repos pour lui ; et pour être sensible à cette affection, elle devint trop insensible à sa propre gloire, » — Voyez aussi les Mémoires de la duchesse de Nemours, belle-fille de Mme de Longueville, p. 133.
  4. Que je n’essayerois point à prendre. (1817, 26, 38.)