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viteur de M. le duc d’Enghien et ami de Coligny[1]. Je connaissais la malignité du duc de Beaufort et de Mme de Montbazon, et je ne doutai point que ce ne fût une méchanceté qu’ils voulaient faire à Mme de Longueville. Je fis tous mes efforts pour engager Mme de Montbazon, par la crainte des suites, à brûler les lettres[2] devant moi, et à n’en parler jamais ; elle me l’avait promis, mais le duc de Beaufort la fit changer. Elle se repentit bientôt de n’avoir pas suivi mon conseil : cette affaire devint publique, et toute la maison de Condé s’y intéressa comme elle devait. Cependant celui qui avait véritablement perdu les lettres était de mes amis, et il aimait la personne qui les avait écrites[3]. Il voyait que les lettres seraient indubitablement reconnues, puisque Monsieur le Prince, Madame la Princesse et Mme de Longueville voulaient les montrer publiquement pour convaincre Mme de Montbazon d’une noire supposition, par la différence de l’écriture. Dans cet embarras, celui qui avait perdu les lettres souffrit tout ce qu’un honnête homme doit souffrir dans une telle rencontre : il me parla de sa douleur, et me pria de tenter toutes choses pour le tirer de l’extrémité où il se trouvait. Je le servis heureusement ; je portai les lettres à la Reine, à Monsieur le Prince et à Madame la Princesse ; je les fis voir à Mme de Rambouillet[4], à Mme de

  1. Voyez ci-dessus, p. 57 et 58.
  2. Ces lettres. (1817, 26, 38.)
  3. « Ces lettres n’étaient point controuvées, dit V. Cousin à l’endroit cité. Elles avaient été écrites par Mme de Fouquerolles au beau et élégant marquis de Maulevrier. »
  4. Catherine de Vivonno, fille unique de Jean de Vivonne, marquis de Pisani , ambassadeur de France à Rome, née en 1588, morte en 1665. Elle épousa en 1600, à l’âge de douze ans, Charles d’Angennes, marquis de Rambouillet. Sur le célèbre hôtel de Rambouillet, voyez V. Cousin, la Société française au dix-septième