Page:La Revue du Mois, tome 2, 1906.djvu/110

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
107
L’INSTRUCTION TECHNIQUE DES ÉQUIPAGES DE LA FLOTTE

au lieu de rester répartis entre les différents services qu’ils desservaient. J’ai déjà signalé plusieurs fois cette grosse erreur due à la fixité et à la stabilité des esprits maritimes.

En monopolisant l’enseignement industriel à la seule spécialité de mécaniciens, à l’exclusion de toutes les autres, on est arrivé à demander trop aux uns ce qui les fait paraître insuffisants, et pas assez aux autres ce qui dilapide leurs capacités éventuelles. Cet ostracisme industriel dont tous les équipages sont frappés est la conception la plus fausse qui existe ; il est dû à une erreur d’appréciation dans la compétence de chacun et dans la facilité de l’acquérir : les marines anglaise, américaine et japonaise qui sont les plus puissantes, ont d’ailleurs fait justice de cette erreur, mais ce serait sortir du cadre de cet article que d’examiner leurs procédés. Quoi qu’il en soit, les causes énumérées plus haut obligèrent à multiplier, il y a une vingtaine d’années, les sources du recrutement des mécaniciens, et, sans entrer dans le détail très aride de cette question, je dirai simplement que chaque mode de recrutement entraîna la création d’une école correspondante destinée à élever chaque apprenti à un niveau professionnel commun.

C’est ainsi que la marine compte aujourd’hui huit cours différents de mécaniciens répartis à Brest, à Lorient, à Toulon et à bord. On conçoit déjà le manque d’harmonie qui doit résulter de cette diversité d’enseignement, et on comprend que, parmi toutes ces sources de recrutement, il y en ait une qui ait donné des résultats meilleurs que les autres et ait constitué, dans le corps entier, une oligarchie puissante au grand détriment du principe égalitaire c’est ce qui est arrivé pour les écoles d’Arts et Métiers. Je ne veux point ici discuter les résultats de cet état de choses ; je le constate simplement, mais dans un article qui traite de l’instruction des mécaniciens, il me sera permis de faire la critique des méthodes d’enseignement actuelles et d’indiquer le principe des réformes qui se préparent.

Or, la marine a le tort de donner indistinctement dans toutes les écoles de mécaniciens un enseignement théorique et pratique et d’exiger ces deux genres de connaissances pour conférer un grade. En adoptant ce mode uniforme d’instruction, elle ne tient pas