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Nous étudierons tout à L’heure comment Lamarck explique l’évolution progressive des espèces ; une autre question se pose d’abord. Les espèces ont varié et se sont perfectionnées, mais comment ont-elles commencé ? Comment la vie a-t-elle apparu ? Lamarck croit à la génération spontanée des animalcules inférieurs (p. 308) :

« … Pour que les corps qui jouissent de la vie soient réellement des productions de la nature, il faut qu’elle ait eu et qu’elle ait encore la faculté de produire directement certains d’entre eux, afin que, les ayant munis de celle de s’accroître, de se multiplier, de composer de plus en plus leur organisation, et de se diversifier avec le temps et selon les circonstances, tous ceux que nous observons maintenant soient véritablement les produits de sa puissance et de ses moyens.

« Ainsi, après avoir reconnu la nécessité de ces créations directes, il faut rechercher quels peuvent être les corps vivants que la nature peut produire directement et les distinguer de ceux qui ne reçoivent qu’indirectement l’existence qu’ils tiennent d’elle. Assurément, le lion, l’aigle, le papillon, le chêne, le rosier ne reçoivent pas directement de la nature l’existence dont ils jouissent ; ils la reçoivent, comme on le sait, d’individus semblables à eux qui la leur communiquent par voie de la génération ; et l’on peut assurer que si l’espèce entière du lion ou celle du chêne venait à être détruite dans les parties du globe où les individus qui la composent se trouvent répandus, les facultés réunies de la nature n’auraient, de longtemps, le pouvoir de la faire exister de nouveau. »

En un autre endroit, il limite aux infusoires la possibilité de la génération spontanée (p. 211) :

« C’est uniquement parmi les animaux de cette classe que la nature paraît former les générations spontanées ou directes qu’elle renouvelle sans cesse chaque fois que les circonstances y sont favorables ; et nous essayerons de faire voir que c’est par eux qu’elle a acquis les moyens de produire indirectement, à la suite d’un temps énorme, toutes les autres races d’animaux que nous connaissons.

« Ce qui autorise à penser que les infusoires, ou que la plupart de ces animaux ne doivent leur existence qu’à des générations spontanées, c’est que ces frêles animaux périssent tous dans les abaissements de température qu’amènent les mauvaises saisons ; et on ne supposera Sûrement pas que des corps aussi délicats puissent laisser aucun bourgeon ayant assez de consistance pour se conserver, et les reproduire dans les temps de chaleur. »

Voilà un certain nombre d’erreurs qui s’expliquent par l’état de la science il y a cent ans. On ne soupçonnait pas les spores, les kystes, les formes de résistance des animalcules infusoires et Lamarck, ne supposant même pas que la génération spontanée de ces petits êtres pût être révoquée en doute, a affirmé que « la nature a eu et a encore la faculté de reproduire certains d’entre eux. » Les travaux de M. Pasteur. en démontrant la possibilité de mettre certains milieux (bouillons