Page:La Revue blanche, t24, 1901.djvu/613

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Réponse au général André


À l’apparition de La revue blanche du 1er avril (et même avant, car nous en avions mis les épreuves en circulation), tous les journaux s’émurent de notre enquête sur le dépôt disciplinaire d’Oléron (insalubrité des locaux, régime de la prison simple, de la prison aggravée, de la cellule simple, de la cellule aggravée, de la cellule de correction, torture de la faim, emploi des fers, des poucettes et du bâillon, supplice de la crapaudine, passage à tabac, etc.).

Aussitôt, leur fut communiquée cette note officieuse :

« Lorsque, il y a une dizaine de jours, les épreuves de La revue blanche lui eurent été communiquées par un ami, le ministre de la guerre partit inopinément pour Oléron, se présenta au pénitentier sans être attendu, et put, par conséquent, juger par lui-même.

« La vérité est que, depuis six mois, c’est-à-dire depuis l’arrivée du nouveau commandant, il n’a plus été fait usage des instruments de torture ; du moins chacun des détenus, pris à part, l’a-t-il affirmé au ministre.

« Le commandant, en effet, avait retiré la libre disposition de ces instruments à ses sous-ordres et s’était réserve d’en faire usage si les circonstances l’y contraignaient.

« Le ministre a été plus loin ; il a donné l’ordre de faire remise du tout à l’artillerie, à charge par elle d’être utilisé comme ferraille.

« Ce voyage rapide du ministre a passé presque inaperçu. »

La presse, unanime, s’extasia sur l’initiative du ministre de la Guerre et le félicita d’avoir jeté au rebut les instruments de supplice. Nous indiquerons le caractère de ces louanges en reproduisant ce fragment d’un article de M. J. Cornély (Figaro du 6 avril) :

« Le général André a fait jeter à la vieille ferraille poucettes et crapaudine, et il me plaît de choisir le jour du vendredi saint pour le féliciter d’avoir fait disparaître l’habitude et les instruments de ces supplices. Aujourd’hui, les plus incrédules ont une pensée de honte, de regret, de commisération et de reconnaissance pour Celui qui mourut, il y a dix-huit cent soixante-huit ans et qui s’offrit en holocauste pour les hommes. Depuis, l’usage s’est établi d’appeler chrétien tout acte de