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le bagne militaire d’oléron
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ses lettres et sur le caractère des opinions du publiciste de Paris ». Appuyée de ce rapport, la demande revint « accordée », et Tardif fut puni de 60 jours de prison dont 30 de cellule «… o/ de l’amiral préfet maritime. — pour avoir communiqué à la presse des renseignements calomnieux sur la discipline du corps ». Le libellé ajoutait : « Cette punition sera lue pendant quinze jours au rapport. »

La lecture des journaux est défendue aux disciplinaires. Une seule feuille avait échappé à l’interdit : le Petit Journal, il parut lui-même suspect, et il fut proscrit également. Son supplément illustré est seul toléré.


EMPLOI DU TEMPS

Entre le réveil et la soupe du soir, les disciplinaires sont assujettis, soit à l’exercice (sans culasse mobile ni baïonnette), soit à des corvées : Corvées d’eau ; charroi des ordures ; vidange des tinettes : travail du jardin.

Corvées d’eau. — Les corvées d’eau sont les plus pénibles. Elles s’exécutent avec trois petits tonneaux et un grand tonneau.

Les « petits tonneaux » sont en fer et montés sur deux roues ; ils contiennent chacun 200 litres. Pour le transport d’un petit tonneau : trois hommes. — un qui le tire, deux qui le poussent.

Le « grand tonneau ». d’une contenance de 800 litres, est en bois, monté sur quatre roues, et est muni d’une flèche à laquelle s’attellent six hommes : derrière, poussent deux autres hommes.

Quelque temps qu’il fasse, par le verglas ou sous la canicule, chaque tonneau, attelé des mêmes hommes, doit faire au moins ses trois voyages d’eau par jour. Le lieu où les disciplinaires puisent l’eau étant éloigné du réservoir d’environ 4 kilomètres, — cela fait un minimum de 24 kilomètres par jour : 12 avec le tonneau vide, 12 avec le tonneau plein. Lorsque l’adjudant Hervé exige quatre voyages du grand tonneau, les disciplinaires de corvée font donc 32 kilomètres dans leur journée, dont 16 en traînant un poids d’environ 1 000 kilogrammes.

En été, quand l’eau est rare à Oléron, les disciplinaires sont rationnés ; les gradés et leurs femmes la gaspillent.

Charroi des tinettes. — Les tinettes de la citadelle sont vidées à 4 ou 5 kilomètres de la forteresse : les disciplinaires de la corvée de tinettes font ce charroi autant de fois qu’il est nécessaire — les tinettes portées à bout de bras dans des brancards, sans halte intermédiaire.

Charroi des ordures. — Une corvée de huit disciplinaires descend, deux ou trois fois par jour, les ordures de la citadelle. Elles sont charriées dans un grand camion à quatre roues jusqu’à 4 kilomètres de la citadelle, derrière le Jardin de la troupe. Trois hommes sont attelés dans les brancards ; trois hommes derrière et deux sur le côté poussent. Le grand tonneau et le grand chariot devraient, réglementairement, être