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La Politique traditionnelle de la France
et les Congrégations


On feint de croire que le gouvernement républicain a inventé que les congrégations religieuses mettent l’État en péril.

Je montrerai ici que la nécessité de limiter l’action, les capacités, le pouvoir des congrégations s’est imposée à la monarchie absolue, comme elle s’impose à l’état démocratique, et ferai toucher du doigt que la politique traditionnelle de la France est une, sur ce point.

Dans la France monarchique, quatre conditions étaient nécessaires pour l’établissement des associations religieuses : le consentement de l’évêque diocésain, celui de toutes les parties intéressées, l’agrément du roi par lettres patentes et l’enregistrement de ces lettres patentes au Parlement dans le ressort duquel se faisait l’établissement.

La première condition semble toute naturelle, l’évêque étant le chef spirituel de toute la chrétienté de son diocèse. Les conciles œcuméniques et régionaux en avaient ainsi ordonné. Néanmoins, il fallut de longues luttes pour aboutir à asseoir cette règle, et l’histoire des États-Généraux du xvie siècle est pleine de l’écho de ces luttes, jusqu’à ce que l’assemblée du clergé de 1645 eût édicté un règlement qui fut adopté par l’autorité royale et qu’on retrouve dans tous ses édits.

L’autorisation des parties intéressées n’était pas moins nécessaire.

Sous l’ancien régime, on entendait par parties intéressées, non seulement les autres monastères ou autres communautés religieuses qu’une nouvelle association pouvait gêner, mais encore les curés et les habitants.

Les curés avaient intérêt en la matière, parce que, plus il y avait de maisons religieuses, plus le peuple avait d’occasions de quitter la paroisse. Un jurisconsulte canonique, Guy du Rousseau de la Combe, en fait la remarque, en termes formels :

« L’ardeur que le peuple, aveugle sur l’avenir, témoigne pour les dévotions extraordinaires, et qui ne sont pas commandées, en négligeant