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Le Champ de Mars




Les peintres du Champs de Mars sont les enfants gâtés du Tout-Paris qui a pour eux des trésors d’indulgence. Habilement lancés par quelques critiques en quête de protégés, les scissionnaires se sont concilié la faveur des banquiers-juifs-mécènes par de menues audaces qui peuvent prêter à la spéculation financière. Voici le principal lieu-commun que l’on a continué de délayer dans les chroniques artistiques : au Champ de Mars il y a une tendance générale vers la lumière. Or le danger est justement là ; cela tourne à l’enrégimentation. Les indigents qui n’ont pas les moyens de s’offrir une lumière personnelle acceptent la lumière officielle, et au lieu de produire leur platitude particulière, piochent la couleur selon la formule vert-bleu-chrome. Seulement le plein air ainsi compris, le plein air de convention est aussi faux que la peinture d’atelier. L’impression que l’on rapporte du Champ de Mars est plutôt favorable ; mais on garde une certaine défiance envers certains spécialistes de l’audace pour amateur éclairé et de la peinture pour bourgeois dans le mouvement. Cette recherche du succès s’accuse surtout chez tes artistes qui se sont accrochés à une célébrité. Je remarque avec regret que les leaders sont accompagnés d’un double, d’un William Wilson qui singe la manière du maître. Il y a des sous-Carrières, les sous-Whistler, des sous-Besnard et des sous-Zorn.