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LA NATURE.

a cessé d’être vrai depuis l’émancipation des colonies d’Amérique qui servaient d’étape intermédiaire entre les Philippines, le vieux continent, et remplissaient un office auquel Cuba ne peut suffire. Actuellement on répète la même chose, à juste titre de l’Angleterre, qui possède le Canada et l’Australie et ses colonies des Antilles et son empire de l’Inde. Mais nous ne sachons pas que jamais personne ait fait remarquer encore, que malgré tous nos malheurs, cet adage pût s’appliquer aux divers points du globe sur lesquels flotte notre pavillon tricolore. En effet, nos colonies d’Orient finissent par 165° de longitude orientale à l’île des Pins, dépendance de la Nouvelle-Calédonie, et nos colonies d’Occident par 65° de longitude occidentale à la Guadeloupe. La différence de longitude comprise entre ces deux points extrêmes est donc seulement de 130° géographiques, espace que le soleil parcourt en 9 heures 20' et qui dépasse de 2 heures 40 la durée du jour des équinoxes égal à 12 heures pour toute la terre. Comme la Guadeloupe est placée par 15° de latitude boréale, et la Nouvelle-Calédonie par 22° de latitude australe, non-seulement les jours les plus courts d’une colonie répondent aux jours les plus longs de l’autre, mais il y a une sorte de compensation presque exacte, car lorsque les jours de la Guadeloupe diminuent, ceux de la Nouvelle-Calédonie augmentent presque de la même durée, et vice versa. Tout se passe donc à peu près pendant le cours de l’année de la même manière que pendant les jours de l’équinoxe. En outre, nous avons pour nous tout le crépuscule et toute l’aurore, dont il est vrai que, dans les régions tropicales, la durée n’est pas longue.

Conservation des viandes. — Les expériences sur la conservation des viandes par le froid ont parfaitement réussi à Londres. Des viandes amenées d’Australie ont été dégustées avec le plus grand succès. Le procédé indiqué consistait à envelopper les viandes dans une enveloppe isolante et d’y entretenir une très-basse température en faisant constamment fondre de la glace à la partie supérieure. Le succès de cette première tentative a été si complet qu’on a résolu d’en faire une seconde sur une grande échelle. On a mis à bord d’un vaisseau 90 tonnes de viande, et la quantité de glace que l’on croyait suffisante pour entretenir la basse température nécessaire à la conservation. Lorsque le navire a été signalé dans la Tamise, les membres de la compagnie se sont rendus à bord. Mais à leur grand désappointement ils ont appris que le navire n’avait pas eu de glace en suffisance et que l’on avait été obligé de jeter toutes les viandes à la mer. La difficulté consiste donc uniquement à entretenir une très-basse température pendant tout le temps de la traversée. C’est un problème que l’on pourrait résoudre si la fabrication de la glace artificielle était plus avancée qu’elle ne l’est actuellement, malgré les promesses de certains prospectus récents.

Sinistre aérien. — Les journaux américains nous apportent le récit épouvantable d’un nouvel accident de ballon arrivé à Chicago. L’aéronaute s’enlevait en montgolfière perdue au-dessous de laquelle était suspendu un trapèze sur lequel il faisait ses tours de gymnase. Son appareil a pris feu au moment du lâchez tout. L’incendie a continué, alimenté par le courant d’air qui accompagne fatalement l’ascension rapide, et a même contribué à diminuer l’énergie du refroidissement de l’air intérieur. Il en est résulté que la montgolfière s’est élevée plus haut que d’ordinaire. Mais bientôt le trapèze auquel le malheureux se tenait suspendu a été détaché et il a été précipité d’une hauteur de 600 mètres. Il est arrivé avec une vitesse si effrayante, que ses jambes ont pénétré dans le sable ; le reste du corps offrait l’aspect d’une épouvantable bouillie sanglante.


ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 27 octobre 1873. — Présidence de M. de Quatrefages.

Les diamants du Cap. — C’est dans un dépôt détritique reposant sur les couches du trias que se rencontrent, au cap de Bonne-Espérance, les diamants qui ont tant fixé l’attention dans ces derniers temps. M. Hugon, qui vient de faire une étude géologique de la région diamantifère, remarque d’abord que le terrain fournissant les gemmes a été remué par les hommes. On y trouve, en effet, des écailles d’huîtres, des fragments d’œufs d’autruche et des objets d’industrie, tels que des perles tombées de quelque collier. Les diamants gisent dans ces dépôts à toutes les profondeurs, depuis la surface jusqu’à la roche vierge, et leur abondance est telle, que tous les chercheurs ont vu leurs travaux récompensés d’une manière fructueuse.

Les diamants sont toujours plus ou moins cassés, ce dont on va voir la cause dans un moment. On remarque qu’en général ils sont d’autant plus jaunâtres que leur volume est plus grand. Plusieurs ont atteint le poids de 224, de 246 et même de 288 carats. Dans aucun pays on n’a vu des mines fournissant autant de beaux diamants que celles du Cap. Une seule exploitation a produit trois mille diamants par jour pendant huit mois !

Les plus précieux, c’est-à-dire ceux dont l’eau est la plus pure, sont cristallisés en octaèdres à arêtes vives. Mais, chose très-inattendue et qui rend compte de leur état fragmentaire habituel, ils sont très-sujets à éclater spontanément au contact de l’air, et cela dans le cours de la première semaine après l’extraction. Exceptionnellement, cette explosion d’un nouveau genre peut se faire au bout de trois mois ; en tout cas, on l’empêche, paraît-il, en enduisant les diamants de suif. Jamais ce fait n’avait été signalé jusqu’ici et il est peut-être de nature à guider les recherches tentées pour découvrir le mode de formation et l’origine de la plus précieuse des pierres précieuses.

En terminant, l’auteur signale l’abondance des grenats comme indice de la présence du diamant. Il note aussi que là où sont beaucoup de petits diamants on n’a guère de chance d’en trouver de gros.

Les mouvements des plantes. — On sait que plusieurs plantes sont douées de la faculté d’exécuter des mouvements plus ou moins étendus. Les unes se livrent ainsi à des mouvements spontanés, comme on l’observe, par exemple, pour les étamines de la rue (ruta), qui viennent d’elles-mêmes se placer en contact avec le pistil ; les autres exécutent leurs mouvements lorsqu’elles reçoivent une excitation extérieure ; telle est la sensitive (mimosa pudica), dont les feuilles se ferment au moindre attouchement. Depuis longtemps les physiologistes se sont demandé si ces divers phénomènes reconnaissent la même cause, ou s’ils sont dus à des actions distinctes. M. Paul Bert, pour trancher la question, a même soumis la sensitive, sous une cloche de verre, à l’action de vapeurs anesthésiques, et il a vu que cette plante continuait de se fermer spontanément, le soir, alors qu’elle était devenue complètement inerte aux excitations extérieures.

Il a paru à M. Eckel, professeur à l’École de pharmacie