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LA NATURE.

tage devenait de plus en plus dur ; la machine du treuil fonctionnait difficilement, quand on vit tout à coup apparaître à fleur d’eau une baleine qui se trouvait prise comme dans un nœud coulant. Les fils formant enveloppe étaient brisés, la gutta-percha, déchirée. Il semble probable que cette baleine cherchant à s’emparer des parasites qui se fixent habituellement sur les câbles, s’est subitement trouvée enlacée dans le fil, pendant qu’on le remontait à la surface de la mer. En se débattant elle s’est enroulée à la naissance de la queue. Comme le câble présentait des morsures fréquentes dans certains endroits voisins de celui où le cétacé avait été pris, les ingénieurs ont supposé que des requins ou d’autres monstres marins ont été cause de la désagrégation qui avait intercepté le courant électrique.

Vitalité des insectes aquatiques. — Le docteur J.-R. Schiner rapporte, dans les Verhandlungen der Kaiserlich-Königlichen zoologisch-botanischen Gesellschaft in Wien, un étonnant exemple de la vitalité des insectes aquatiques. Il avait laissé un aquarium complètement à sec, depuis le mois d’août jusqu’au mois d’octobre 1871. À son retour, il voulut l’emplir de nouveau. Lorsque, au bout de quelques heures, l’eau fut devenue claire et transparente, il y vit, à sa grande surprise, s’agiter six petits insectes : trois Halyplus, deux espèces de Philhydrus, et un Colymbetes. Cependant, les fenêtres de l’appartement étaient restées fermées, et l’eau, puisée à la fontaine de la maison, était parfaitement claire. Il faut donc admettre que les insectes avaient vécu dans une sorte d’engourdissement. Le dessèchement, même complet, d’un étang ne suffit donc pas à faire mourir ou émigrer tous les insectes parfaits qui y habitaient. (Société Linnéenne.)

Une découverte archéologique. — Il n’est bruit à Nidau que d’une trouvaille merveilleuse. On aurait pêché dans la Thielle une longue caisse de quatre pieds de long, marquée aux chiffres I d. I, toute bardée de fer et pleine de pièces d’or. On prétend, qu’en 1388, dit le Journal de Genève, les Bernois laissèrent chavirer sur la rivière, gonflée par les eaux, une de leurs barques qui servaient au siège du château, et que, dans cette barque, se trouvait déposée la caisse en question. C’était à l’époque où Enguerrand IV, le dernier des sires de Coucy, avait reçu de l’Autriche le comté de Nidau comme apanage. Ce qui resta des biens du sire de Coucy fut cédé aux Orléans. On a également mis à découvert une butte lacustre dans laquelle on a trouvé toute une famille, dont les squelettes sont assez bien conservés pour qu’on puisse encore voir la peau et les cheveux. Le tout sera déposé incessamment au musée de Nidau.


ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 13 octobre 1873. — Présidence de M. de Quatrefages.

Encore un deuil : M. Antoine Passy est mort cette semaine. L’Académie n’a pas pu se faire représenter à ses obsèques, qui ont eu lieu loin de Paris, mais une notice biographique sera rédigée par le doyen de la section à laquelle appartenait l’académicien décédé. — À cette occasion, signalons l’apparition d’un volume, déposé sur le bureau par M. Dumas et qui sera lu avec le plus vif intérêt par tous les amis des sciences. C’est la biographie complète de Rumfort. Américain de naissance, il fut longtemps ministre en Bavière, contribua puissamment à Londres à la fondation de l’Institution royal avec Davy et Faraday, enfin habita Paris pendant de nombreuses années et prit part aux travaux de l’Institut. Le volume présenté aujourd’hui constitue l’introduction aux œuvres complètes de Rumfort, dont l’éditeur est M. Ellis.

Ascension scientifique. — Le secrétaire perpétuel résume avec le plus grand soin la relation que notre rédacteur en chef, M. Gaston Tissandier, adresse de son dernier voyage aérien. Les deux faits signalés spécialement par M. Dumas comme particulièrement intéressants sont, d’une part, les brusques variations observées par le voyageur, quant à l’état hygrométrique de l’air des diverses couches traversées, et en second lieu l’apparition d’une magnifique auréole lumineuse autour de l’ombre portée par l’aérostat au moment où celui-ci passait au-dessus d’une prairie.

Le climat des montagnes. — Le sujet traité par M. le Dr Lombard sera une transition entre la communication précédente et les travaux absolument terrestres qui suivront : il s’agit du climat des montagnes considéré surtout au point de vue de l’hygiène et de la médecine. D’après l’auteur, les populations montagnardes sont presque complètement à l’abri de la phtisie pulmonaire ; seulement, comme il paraît que les pneumonies sont très-communes chez elles, on peut regarder leur bénéfice comme fort douteux. Une remarque intéressante mais qui, semble-t-il, aurait dû être faite depuis longtemps, est relative aux malades auxquels on ordonne l’air des montagnes : elle consiste dans la nécessité, lors d’une pareille prescription, d’avoir égard à l’altitude que le malade habite normalement. Ainsi le séjour à 600 mètres fera le même effet sur un malade habitué à l’altitude de 300 mètres que celle-ci à un riverain de l’Océan.

Un réactif de la galène. — Un phénomène jusqu’ici mystérieux, mais qui n’en est pas moins propre à rendre des services aux minéralogistes et aux chimistes, est signalé par M. Jannettaz, aide-naturaliste au Muséum. Il s’agit du dégagement très-net de l’hydrogène sulfuré lorsque l’on broie le sulfure de plomb ou galène avec le bisulfate de potasse sec. Les autres sulfures naturels essayés n’ont pas reproduit ce dégagement inattendu qui paraît propre à faire reconnaître la galène jusque dans ses mélanges. Le fait est d’autant plus remarquable que le sulfure de plomb est l’un des composés les plus stables que l’on connaisse.

Le phylloxéra. — Le phylloxéra continue d’exercer la sagacité et la patience des observateurs. Laissons de côté l’idée fort peu pratique de M. Pollet (?), qui consiste à combattre l’insecte par de la mie de pain déposée au pied des ceps infectés. Nous avons aujourd’hui à analyser un nouveau travail de M. Maxime Cornu. Cet infatigable observateur a voulu savoir comment, en définitive, le phylloxéra des racines passe aux feuilles, et il y est parvenu. On pensait que le phylloxéra des racines, prenant des ailes à la suite de ses métamorphoses, allait se fixer sur des feuilles, où il déterminait le développement des galles. Mais il paraît que les choses se passent autrement. Lorsque les racines dont l’insecte fait sa nourriture de prédilection viennent à s’épuiser, le phylloxéra les quitte et parvient à la surface du sol. Quoique pourvu seulement d’yeux rudimentaires, il est très-sensible à l’action de la lumière, et