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prince nègre, nommé Aniaba, dont l’histoire est assez singulière.

Un roi d’Issini avait donné au père Consalve, autre missionnaire, deux petits Nègres pour les faire élever dans le christianisme. Consalve, apparemment dans l’envie de se faire valoir, envie si naturelle à qui vient de loin, fit passer ces deux Nègres, lorsqu’il fut de retour en France, pour les fils du roi d’Issini. Ils se nommaient Aniaba et Rianga. Rianga mourut. Aniaba fut baptisé par le célèbre Bossuet ; il reçut en France l’éducation qu’on croyait convenable à un jeune prince. Louis XIV fut son parrain. On lit dans un Mercure de France, imprimé en 1701, que cet Aniaba reçut l’Eucharistie des mains du cardinal de Noailles, et offrit un tableau à la Vierge pour mettre tous ses états sous sa protection, avec un vœu solennel d’employer, à son retour en Afrique, tous ses soins et ses efforts à la conversion de ses sujets. En débarquant sur la côte, il fut reconnu pour le fils d’un cabochir d’Issini ; il retourna à sa religion, et se moqua des Français.

« Le lecteur, dit le père Loyer, sera surpris de trouver ici des royaumes dont les monarques ne sont que des paysans ; des villes qui ne sont bâties que de roseaux ; des vaisseaux composés d’un tronc d’arbre ; et surtout un peuple qui vit sans soins, qui parle sans règle, qui fait des affaires sans le secours de l’écriture, et qui marche sans habit ; un peuple