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d’un morceau d’étoffe, de peur qu’il n’y entre une mouche. Malgré la passion qu’ils ont pour le tabac, ils ne touchent point à leur pipe. Mais, lorsque la nuit arrive, ils se dédommagent de l’abstinence du jour. Les grands et les riches passent ensuite tout le jour à dormir.

Lorsque le mois du ramadan approche de sa fin, ils proclament le Tabasket, c’est-à-dire, la plus grande fête des mahométans nègres, comme des Turcs et des Persans, qui lui donnent le nom de Bayram. Brue, qui en avait été témoin, nous a laissé la description de cette fête, qui est proprement leur carnaval.

Un peu avant le coucher du soleil, on vit paraître six marabouts, ou prêtres mahométans, revêtus de tuniques blanches, qui ressemblent à nos surplis. Elles leur descendent jusqu’au milieu des jambes, et le bas est bordé de laine rouge. Ils marchaient en rang, avec une longue zagaie à la main, précédés de cinq grands bœufs, qui étaient couverts d’un beau drap de coton et couronnés de feuilles, chacun conduit par deux Nègres, comme on conduit dans les rues de Paris ce qu’on appelle le bœuf gras. Les fêtes populaires ont partout des rapports d’un bout du monde à l’autre. Les chefs des cinq villages dont la ville de Boucar est composée suivaient les prêtres sur une seule ligne, parés de leurs plus riches habits, armées de zagaies, de sabres, de poignards et de boucliers. Ils étaient suivis eux-mêmes de tous les habitans, leurs sujets, cinq sur chaque