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Mémoires

demeurai à Paris pour vaquer à quelques affaires pressantes que je ne pouvois remettre, et donnai ordre à ceux que j’envoyois avec lui de le bien recevoir. Quand il fut arrivé à ma maison, le curé de la paroisse le vint voir avec MM. de la justice, qui le prièrent de se disposer pour toucher le lendemain, à l’issue de la grande messe, quantité de personnes qui s’y dévoient trouver. Il le promit, et toucha ensuite tout ce qui étoit chez moi, jusqu’aux chats. Une vache qui commençoit à prendre le chemin des deux autres en demeura là, ce qui fut vu de quantité de gens ; et même un nommé M. de Grandchamps, qui est un gentilhomme d’honneur et de la religion réformée, s’y trouva, et en vit la merveille de ses propres yeux, dont il demeura tout surpris. Ce bon chevalier toucha le lendemain plus de mille personnes par précaution, car depuis qu’on en a été touché on est hors de danger des bêtes enragées. Le Roi lui a dit plusieurs fois qu’il falloit qu’il se mariât, pour laisser de sa race, qui étoit nécessaire pour le public. Il jeta les yeux sur ma fille, qu’il trouva à son gré. Avant que de m’en parler il prit la liberté de dire au Roi : « Sire, je suis résolu de me marier ; j’ai vu une demoiselle à la campagne qui m’agrée fort, étant sage et honnête : Votre Majesté sait qu’il ne m’en faut point d’autre. J’espère, Sire, que vous aurez la bonté de me faire quelque grâce en faveur de mon mariage. « Le Roi lui dit : « Faites. Je vous ferai un présent considérable, et la reine