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de Mme de La Guette.

il est de la race de ce grand saint, il a la vertu d’empêcher la rage, et tous ceux qui sont touchés de lui se tiennent heureux. Le roi même l’a été et toute la cour, ainsi qu’une infinité de personnes du royaume. Je le rencontrai heureusement, et lui dis ce qui m’étoit arrivé. Il m’assura que si j’avois été encore deux fois vingt-quatre heures sans le voir, j’aurois enragé indubitablement. Il me donna ordre de me confesser et de communier le lendemain, et dit qu’il en feroit autant ; que je vinsse le trouver à huit heures et qu’il me toucheroit. Aussitôt qu’il m’eut touchée, je le priai de monter en carrosse et de venir chez moi pour toucher tout ce qui y étoit, c’est-à-dire mes domestiques et mes bêtes. Il eut la bonté de s’y en aller à l’heure même, et moi je

    le chevalier étoit en âge de se marier. Accordons qu’il avoit quarante ans. Il n’en auroit eu que soixante-dix-neuf en 1701. Un pareil exemple de longévité est-il donc si incroyable ? L’abbé Lecanu suppose qu’on n’avoit jamais connu avant 1649 aucun descendant de Saint-Hubert qui prétendît guérir de la rage ; mais Guillaume Morin, dans son Histoire générale du Gâtinois, publiée en 1630, parle d’un Jacques du Quesnay, seigneur de Varennes, qui avoit cette prétention comme issu du saint évêque de Liége par sa mère, Marie Guillart. Il parle également d’une religieuse de ce nom de Guillart, qui étoit en possession de toucher les personnes mordues par des bêtes enragées. Nous ne voulons pourtant pas conclure en faveur du miracle. Quoi qu’il en soit, l’industrie du chevalier de Saint-Hubert ne l’avoit pas enrichi ; car madame de La Guette nous apprend qu’elle refusa de lui donner sa fille, parce qu’il étoit trop pauvre. Terminons en faisant remarquer que la duchesse d’Angoulême « le considéroit fort pour sa vertu, » et qu’elle le tenoit « homme de bien et fort charitable. » On en aura la preuve un peu plus loin.