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Le Bouif errant

d’oiseaux. Le coloris de ce vêtement était assorti aux tentures de la pièce.

Une glace renvoya au Bouif son image. Une image prodigieusement effarée !

— Sans blague, fit-il, en se tâtant. J’ai pourtant été écrasé cette nuit par un tramway. Je me suis donné la mort de ma propre volonté.

— Non, fit de nouveau l’assyriologue, car nous vous avons trouvé évanoui sur une voie d’aiguillage. Vous aviez, il est vrai, la tête posée sur le sol à dix centimètres de la voie principale. Un faux mouvement et… c’était la mort. Nous sommes fort heureusement intervenus à temps…

— De quel droit ? hurle le rescapé. De quoi vous êtes-vous mêlé ?

— Mais…

— Un suicide que j’avais préparé avec tant de soin que cela ressemblait à une œuvre d’art !…

— Cependant…

— Pourquoi que vous m’avez extrait de l’insensibilité du Néant dans laquelle j’étais introduit. Tout est à recommencer grâce à vous. Il y a toujours des gens qui s’ostinent à embêter leur concitoilliens. Est-ce que vous étiez chargés de contrôle mon existence ? Est-ce que ma vie ne m’appartient pas ? Je devrais vous attaquer devant les tribunaux et vous demander des dommages.

Il parlait haut, s’animait, s’indignait, prenait à témoin Baal et Moloch, parlait d’écrire aux journaux ou de faire déposer une interpellation à la Chambre, où il comptait des amis… etc.

Cagliari attendit froidement la fin de ce déluge de paroles.