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Le Bouif errant

hommes politiques en les précipitant, après les avoir comblés d’honneur, du haut de la Roche Tarpéienne. Ainsi le Bouif, ancien ministre, irait s’écraser sur les dalles auprès du Soldat inconnu.

— Quel fait divers ! pensait-il.

Et, dans sa pensée galopante, il lisait prématurément les comptes rendus des quotidiens : « Un suicide sensationnel !… La fin d’une célébrité parlementaire… Un ancien Bistro de la Chambre trouve la mort sous l’Arc de Triomphe. » Etc.

Peut-être le bruit de cet événement réveillerait-il une pensée des femmes qu’il avait aimées. Il songea à l’opulente Suzanne Pomponne, et à Cécile Coqueluche (Kiki), qui apprendrait sa mort, sur le paquebot, par la télégraphie sans fil. Cette idée l’émut beaucoup.

Un sursaut de sa volonté l’arracha à ces pensées.

— Finissons-en ! dit-il, en traversant résolument la place de l’Étoile.

Parvenu sous l’Arc de Triomphe, il regarda une dernière fois l’avenue des Champs-Élysées et se découvrit :

— Adieu, Paname ! fit-il.

Bien qu’exécuté avec un chapeau de paille, le geste avait beaucoup d’ampleur.

Néanmoins, l’agent qui surveillait Bicard fronça les sourcils et devint encore plus attentif. Il était de plus en plus convaincu qu’il avait à faire à un fou.

Assis sur le rebord d’une saillie du monument de gloire, Bicard, qui avait trouvé par terre un crayon égaré par quelque touriste, écrivait ses dernières volontés :