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Le Bouif errant

tyr ; Comte du pape, Prince d’Hémoglobine : diadoque de Sétavomir… je connais tous les titres de Votre Majesté. Depuis vingt ans que la Carinthie a les yeux sur vous…

— Sans blague ! gouailla le Bouif. Vous êtes sûr ?

— Pas un seul des instants précieux de votre existence n’a été ignoré de vos fidèles sujets. C’est pourquoi, pénétré d’admiration pour le courage avec lequel vous avez supporté l’infortune, le Conseil de la Couronne a songé que vous étiez digne de gouverner plus qu’un autre… Sire ! la Carinthie attend son roi !…

— Qui ? fit Bicard en se redressant.

— Vous !

— Moi ?

— Oui, Sire.

Il y eut un vacarme de notes, des cordes cédèrent avec un bruit métallique. Le roy se tortillait, dans son piano à queue, avec des gestes convulsifs. Une crise de fou rire l’étouffait. Il gesticulait si frénétiquement qu’il perdit une de ses pantoufles, que Bossouzof lui rapporta.

— Quel filon ! râla-t-il en se calmant. Ainsi, vous m’aviez reconnu ?

Bossouzof paya d’audace.

— Majesté, votre royale physionomie a toujours été chère à vos fidèles sujets. Un monarque de vingt ans est toujours populaire.

Le diplomate mentait effrontément. Les Carinthiens n’avaient jamais vu Ladislas. De plus, si Bossouzof avait été physionomiste, il eût certaine-