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Ma muse, en un sujet si doux,
Voudrait s’étendre davantage :
Mais il faut réserver à d’autres cet emploi ;
Et d’un plus grand maître que moi
Votre louange est le partage[1].
Olympe, c’est assez qu’à mon dernier ouvrage
Votre nom serve un jour de rempart et d’abri ;
Protégez désormais le livre favori
Par qui j’ose espérer une seconde vie :
Sous vos seuls auspices ces vers
Seront jugés, malgré l’envie,
Dignes des yeux de l’univers.
Je ne mérite pas une faveur si grande ;
La fable en son nom la demande :
Vous savez quel crédit ce mensonge a sur nous.
S’il procure à mes vers le bonheur de vous plaire,
Je croirai lui devoir un temple pour salaire :
Mais je ne veux bâtir des temples que pour vous.


I

LES ANIMAUX MALADES DE LA PESTE

Un mal qui répand la terreur,
Mal que le ciel en sa fureur
Inventa pour punir les crimes de la terre,
La peste (puisqu’il faut l’appeler par son nom),
Capable d’enrichir en un jour l’Achéron,
Faisait aux animaux la guerre.
Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés :
On n’en voyait point d’occupés
À chercher le soutien d’une mourante vie ;
Nul mets n’excitait leur envie ;

  1. Louis XIV.