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(Bien moins que le regret d’une mort si funeste)
Fit qu’en perdant les miens, j’abandonnay le reste.
J’en observay le deuil qu’exigeoit mon devoir :
Tout un an se passa sans qu’aucun pût me voir ;
Enfin, nostre Soldat vint m’offrir son service ;
Loin de me consoler ce m’estoit un supplice.
Vous sçavez qu’on ne peut le souffrir sans ennuy ;
Je l’ay pourtant souffert, esperant quelque appuy.

Parmenon

Vous tirez de mon Maistre encor plus d’assistance.

Thaïs

Je l’avouë et voudrois qu’une autre recompense
Esgalast les bien-faits dont il me sçait combler.

Parmenon

Helas ! le pauvre Amant commence à se troubler

Phœdrie

Te tairas-tu ? Thaïs, achevez je vous prie.

Thaïs

Au bout de quelque temps Thrason fut en Carie ;
Et vous sçavez qu’à peine il estoit délogé,
Qu’on vous vit à m’aymer aussi-tost engagé :
Vous me vintes offrir et credit et fortune,
J’en estimay deslors la faveur peu commune ;
Et vous n’ignorez pas combien, depuis ce jour,
J’ay tesmoigné de zele à gagner vostre amour.

Phœdrie

Je croy que Parmenon n’a garde de se taire

Parmenon

En pouriez-vous douter ? Mais où tend ce mistere ?

Phœdrie

Tu le sçauras trop tost pour ton[1] contentement.

Thaïs

Escoutez-moy, de grace, encor un seul moment !

  1. L’édition originale porte, mais à tort : mon.