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PREFACE.

Espagnol qui se piquoit d’estre fils de ses propres œuvres. Quoy que j’aye autant de besoin de ces artifices que pas un autre, je ne sçaurois me resoudre à les employer : seulement je m’accommoderay, s’il m’est possile, au goust de mon siecle, instruit que je suis par ma propre experience qu’il n’y a rien de plus necessaire. En effet, on ne peut pas dire que toutes saisons soient favorables pour toutes sortes de Livres. Nous avons veu les Rondeaux, les Metamorphoses, les Bouts-rimez, regner tour à tour : Maintenant ces Galanteries sont hors de mode, et personne ne s’en soucie : tant il est certain que ce qui plaist en un temps peut ne pas plaire en un autre. Il n’appartient qu’aux Ouvrages vrayment solides et d’une souveraine beauté, d’estre bien receus de tous les Esprits, et dans tous les Siecles, sans avoir d’autre passe-port que le seul merite dont ils sont pleins. Comme les miens sont fort eloignez d’un si haut degré de perfection, la prudence veut que je les garde en mon Cabinet, à moins que de bien prendre mon temps pour les en tirer. C’est ce que j’ay fait, ou que j’ay creu faire dans cette seconde Edition, où je n’ay ajousté de nouveaux Contes que parce qu’il m’a semblé qu’on estoit en train d’y prendre plaisir. Il y en a que j’ay estendus, et d’autres que j’ay accourcis, seulement pour diversifier et me rendre moins ennuyeux. On en trouvera mesme quelques-uns que j’ay pretendu mettre en Epigrammes. Tout cela n’a fait qu’un petit Recueil aussi peu considerable par sa grosseur que par la qualité des Ouvrages qui le composent. Pour le grossir, j’ay tiré de mes papiers je ne sçais quelle Imitation des Arrests d’amours, avec un Fragment