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pendant son mal ; mais, quand il se porta mieux, qu’il vit du monde, et entre autres M. de Nemours, qui, sur le prétexte d’être encore faible, y passait la plus grande partie du jour, elle trouva qu’elle n’y pouvait plus demeurer : elle n’eut pas néanmoins la force d’en sortir les premières fois qu’il y vint ; il y avait trop long-temps qu’elle ne l’avait vu, pour se résoudre à ne le voir pas. Ce prince trouva le moyen de lui faire entendre, par des discours qui ne semblaient que généraux, mais qu’elle entendait néanmoins, parce qu’ils avaient du rapport à ce qu’il lui avait dit chez elle, qu’il allait à la chasse pour rêver, et qu’il n’allait point aux assemblées parce qu’elle n’y était pas.

Elle exécuta enfin la résolution qu’elle avait prise de sortir de chez son mari lorsqu’il y serait ; ce fut toutefois en se faisant une extrême violence. Ce prince vit bien qu’elle le fuyait, et en fut sensiblement touché.

M. de Clèves ne prit pas garde d’abord à la conduite de sa femme ; mais enfin il s’aperçut qu’elle ne voulait pas être dans sa chambre lorsqu’il y avait du monde. Il lui en parla, et elle lui répondit qu’elle ne croyait pas que la bienséance voulût qu’elle fût tous les soirs avec ce qu’il y avait de plus jeune à la cour ; qu’elle le suppliait de trouver bon qu’elle fît une vie plus retirée qu’elle n’avait accoutumé ; que la vertu et la présence de sa mère autorisaient beaucoup de choses qu’une femme de son âge ne pouvait soutenir.

M. de Clèves, qui avait naturellement beaucoup de douceur et de complaisance pour sa femme, n’en eut pas en cette occasion, et il lui dit qu’il ne voulait pas absolument qu’elle changeât de conduite. Elle fut prête