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de Valentinois ne pouvait pardonner à madame d’Estampes de lui avoir ôté le titre de maîtresse du roi. Madame d’Estampes avait une jalousie violente contre madame de Valentinois, parce que le roi conservait un commerce avec elle. Ce prince n’avait pas une fidélité exacte pour ses maîtresses : il y en avait toujours une qui avait le titre et les honneurs, mais les dames que l’on appelait de la petite bande le partageaient tour-à-tour. La perte du dauphin son fils, qui mourut à Tournon, et que l’on crut empoisonné, lui donna une sensible affliction. Il n’avait pas la même tendresse, ni le même goût pour son second fils, qui règne présentement ; il ne lui trouvait pas assez de hardiesse, ni assez de vivacité. Il s’en plaignit un jour à madame de Valentinois, et elle lui dit qu’elle voulait le faire devenir amoureux d’elle, pour le rendre plus vif et plus agréable. Elle y réussit comme vous le voyez. Il y a plus de vingt ans que cette passion dure, sans qu’elle ait été altérée, ni par le temps, ni par les obstacles.

Le feu roi s’y opposa d’abord ; et, soit qu’il eût encore assez d’amour pour madame de Valentinois pour avoir de la jalousie, ou qu’il fût poussé par la duchesse d’Estampes, qui était au désespoir que M. le dauphin fût attaché à son ennemie, il est certain qu’il vit cette passion avec une colère et un chagrin dont il donnait tous les jours des marques. Son fils ne craignit ni sa colère ni sa haine, et rien ne put l’obliger à diminuer son attachement, ni à le cacher ; il fallut que le roi s’accoutumât à le souffrir. Aussi cette opposition à ses volontés l’éloigna encore