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fois se refuser le plaisir de lui apprendre qu’il savait le secret de son amour ; et l’abordant en sortant de la salle où l’on avait dansé : C’est trop, lui dit-il, d’oser lever les yeux jusqu’à ma sœur, et de m’ôter ma maîtresse. La considération du roi m’empêche d’éclater ; mais souvenez-vous que la perte de votre vie sera peut-être la moindre chose dont je punirai quelque jour votre témérité. La fierté du duc de Guise n’était pas accoutumée à de telles menaces ; il ne put néanmoins y répondre, parce que le roi, qui sortait dans ce moment, les appela tous deux ; mais elles gravèrent dans son cœur un desir de vengeance qu’il travailla toute sa vie à satisfaire. Dès le même soir, le duc d’Anjou lui rendit toutes sortes de mauvais offices auprès du roi. Il lui persuada que jamais Madame ne consentirait d’être mariée avec le roi de Navarre, avec qui on proposait de la marier, tant que l’on souffrirait que le duc de Guise l’approchât ; et qu’il était honteux de souffrir qu’un de ses sujets, pour satisfaire à sa vanité, apportât de l’obstacle à une chose qui devait donner la paix à la France. Le roi avait déjà assez d’aigreur contre le duc de Guise : ce discours l’augmenta si fort, que, le voyant le lendemain, comme il se présentait pour entrer au bal chez la reine, paré d’un nombre infini de pierreries, mais plus paré encore de sa bonne mine, il se mit à l’entrée de la porte, et lui demanda brusquement où il allait. Le duc, sans s’étonner, lui dit qu’il venait pour lui rendre ses très-humbles services : à quoi le roi répliqua, qu’il n’avait pas besoin de ceux qu’il lui rendait, et se tourna, sans le regarder. Le duc de Guise ne laissa pas d’entrer dans