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dans une beauté qu’ils crurent surnaturelle. Le duc de Guise la reconnut d’abord, malgré le changement avantageux qui s’était fait en elle depuis les trois années qu’il ne l’avait vue. Il dit au duc d’Anjou qui elle était, qui fut honteux d’abord de la liberté qu’il avait prise ; mais, voyant madame de Montpensier si belle, et cette aventure lui plaisant si fort, il se résolut de l’achever ; et, après mille excuses et mille compliments, il inventa une affaire considérable, qu’il disait avoir au-delà de la rivière, et accepta l’offre qu’elle lui fit de le passer dans son bateau. Il y entra seul avec le duc de Guise, donnant ordre à tous ceux qui les suivaient d’aller passer la rivière à un autre endroit, et de les venir joindre à Champigni, que madame de Montpensier leur dit qui n’était qu’à deux lieues de là. Sitôt qu’ils furent dans le bateau, le duc d’Anjou lui demanda à quoi ils devaient une si agréable rencontre, et ce qu’elle faisait au milieu de la rivière. Elle lui répondit, qu’étant partie de Champigni avec le prince son mari, dans le dessein de le suivre à la chasse, s’étant trouvée trop lasse, elle était venue sur le bord de la rivière, où la curiosité de voir prendre un saumon qui avait donné dans un filet, l’avait fait entrer dans ce bateau. M. de Guise ne se mêlait point dans la conversation ; mais, sentant réveiller vivement dans son cœur tout ce que cette princesse y avait autrefois fait naître, il pensait en lui-même qu’il sortirait difficilement de cette aventure, sans rentrer dans ses liens. Ils arrivèrent bientôt au bord, où ils trouvèrent les chevaux et les écuyers de madame de Montpensier qui l’attendaient. Le duc d’Anjou et le duc de Guise