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Nemours. Le vidame la vint voir, et servit ce prince avec tout l’esprit et l’application imaginables. Il ne la put faire changer sur sa conduite, ni sur celle qu’elle avait imposée à M. de Nemours. Elle lui dit que son dessein était de demeurer dans l’état où elle se trouvait ; qu’elle connaissait que ce dessein était difficile à exécuter, mais qu’elle espérait d’en avoir la force. Elle lui fit si bien voir à quel point elle était touchée de l’opinion que M. de Nemours avait causé la mort à son mari, et combien elle était persuadée qu’elle ferait une action contre son devoir en l’épousant, que le vidame craignit qu’il ne fût mal-aisé de lui ôter cette impression. Il ne dit pas à ce prince ce qu’il pensait ; et, en lui rendant compte de sa conversation, il lui laissa toute l’espérance que la raison doit donner à un homme qui est aimé.

Ils partirent le lendemain, et allèrent joindre le roi. M. le vidame écrivit à madame de Clèves, à la prière de M. de Nemours, pour lui parler de ce prince ; et, dans une seconde lettre qui suivit bientôt la première, M. de Nemours y mit quelques lignes de sa main. Mais madame de Clèves, qui ne voulait pas sortir des règles qu’elle s’était imposées, et qui craignait les accidents qui peuvent arriver par les lettres, manda au vidame qu’elle ne recevrait plus les siennes, s’il continuait à lui parler de M. de Nemours ; et elle lui manda si fortement, que ce prince le pria même de ne le plus nommer.

La cour alla conduire la reine d’Espagne jusqu’en Poitou. Pendant cette absence, madame de Clèves demeura à elle-même ; et, à mesure qu’elle était éloignée