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neriez lieu de croire que c’est avec la reine dauphine, si le peu de jalousie que je vous vois de M. d’Anville ne m’en ôtait la pensée ; mais, quoi qu’il en soit, il est juste que vous ne sacrifiiez pas votre repos au mien, et je veux bien vous donner les moyens de faire voir à celle que vous aimez que cette lettre s’adresse à moi et non pas à vous : voilà un billet de madame d’Amboise, qui est amie de madame de Thémines, et à qui elle s’est fiée de tous les sentiments qu’elle a eus pour moi. Par ce billet elle me redemande cette lettre de son amie, que j’ai perdue. Mon nom est sur le billet ; et ce qui est dedans prouve, sans aucun doute, que la lettre que l’on me redemande est la même que l’on a trouvée. Je vous remets ce billet entre les mains, et je consens que vous le montriez à votre maîtresse pour vous justifier. Je vous conjure de ne perdre pas un moment, et d’aller dès ce matin chez madame la dauphine.

M. de Nemours le promit au vidame de Chartres, et prit le billet de madame d’Amboise : néanmoins, son dessein n’était pas de voir la reine dauphine ; et il trouvait qu’il avait quelque chose de plus pressé à faire. Il ne doutait pas qu’elle n’eût déja parlé de la lettre à madame de Clèves, et il ne pouvait supporter qu’une personne qu’il aimait si éperdûment eût lieu de croire qu’il eût quelque attachement pour une autre.

Il alla chez elle à l’heure qu’il crut qu’elle pouvait être éveillée, et lui fit dire qu’il ne demanderait pas à avoir l’honneur de la voir à une heure si extraordinaire, si une affaire de conséquence ne l’y obligeait. Madame de Clèves était encore au lit, l’esprit aigri et