Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 1.djvu/306

Cette page n’a pas encore été corrigée

j'avais peine à comprendre sa douleur, et qu'il me paraissait difficile d'avoir tant d'affliction pour être destinée à passer sa vie avec Alamir. Cet infidèle avait si bien oublié les sentiments qu'il m'avait fait paraître, qu'ayant appris par Zuléma la répugnance que Zayde avait témoignée pour lui, il vint m'en faire les plaintes et implorer mon secours. Toute ma raison et toute ma constance furent prêtes à m'abandonner, je sentis un trouble et une émotion dont il se serait aperçu s'il n'eût été troublé lui-même par la même passion qui m'agitait. Enfin, après un silence qui ne parlait peut-être que trop : Je suis étonnée que personne, lui dis-je, de la répugnance que Zayde témoigne aux volontés de Zuléma, mais je suis aussi moins propre que personne à la faire changer. Je parlerais contre mes propres sentiments, et le malheur d'être attachée à une personne de votre nation m'est si connu, que je ne puis conseiller à Zayde de s'y exposer. Bélénie m'a fait connaître ce malheur depuis que je suis née, et je crois qu'Alasinthe en a si bien instruit sa fille, qu'il sera difficile de la faire consentir à ce que vous souhaitez, et, pour moi, je vous assure encore une fois que j'en suis moins capable que personne.

Almir fut très affligé de me trouver dans des dispositions qui lui étaient si peu favorables ; il espéra de me gagner en me laissant voir toute sa douleur et toute la passion qu'il avait pour Zayde. J'étais au désespoir de tout ce qu'il me disait, mais je ne laissais pas de le plaindre par la conformité de nos malheurs. Je n'avais pas un sentiment qui ne fût combattu par un autre ; l'éloignement que Zayde avait pour lui, me donnait quelque