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eux-mêmes. Je naquis d'Osmin et de Bélénie et Zayde de Zuléma et d'Alasinthe. La passion de Zuléma et celle d'Osmin les obligea de passer quelques années dans l'île de Chypre, mais enfin le désir de trouver quelques conjonctures favorables pour renouveler les prétentions de leur père les rappela en Afrique. Ils eurent d'abord de grandes espérances et, contre les règles de la politique, le calife qui succéda à Osman, leur donna des emplois si considérables, qu'Alasinthe et Bélénie ne se pouvaient plaindre de leur éloignement, mais, après cinq ou six années d'absence, elles commencèrent à s'en plaindre et à s'en affliger. Elles surent qu'ils avaient d'autres occupations que celles de la guerre ; elles avaient de leurs nouvelles, mais, comme ils ne revenaient point, elles se crurent abandonnées. Alasinthe ne songea plus qu'à Zayde, qui méritait déjà toute son application, et Bélénie ne pensa qu'à m'élever avec beaucoup de soin.

Lorsque nous commençâmes à sortir de l'enfance, Alasinthe et Bélénie se retirèrent dans un château sur le bord de la mer ; elles y faisaient une vie conforme à leur tristesse ; le soin qu'elles avaient de Zayde et de moi, les obligeait néanmoins à vivre avec une grandeur et une magnificence qu'elles auraient peut-être abandonnées par leur propre inclination. Nous avions auprès de nous plusieurs jeunes personnes de qualité, et rien ne manquait à ce qui pouvait contribuer à notre éducation et aux divertissements conformes à la retraite où l'on nous élevait. Zayde et moi n'étions pas moins liées par l'amitié que par le sang. J'avais deux années plus qu'elle ; il y avait aussi quelque différence