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Son fidèle domestique, qui l’avait suivi, avait sauvé ses chevaux et ses effets. Il n’en était pas de même pour beaucoup d’autres, à qui les effets avaient été volés par les Prussiens, et même leurs chevaux. Le repos le rétablit assez promptement. Il vendit assez bien à un officier prussien une jolie jument. Le prix était convenu à 36 louis, mais on ne le paya qu’en frédérics, ce qui fut une véritable friponnerie. Mon mari voulut se plaindre au chef de son corps ; mais on lui conseilla de n’en rien faire ; les émigrés avaient perdu tout leur crédit et on se serait moqué de la plainte de mon mari.

L’ordre vint à tous les émigrés de sortir de Trèves. Le déplacement était coûteux ; nous devions songer à ménager nos fonds. Le curé de Charmes, dans l’évêché de Nancy, qui était à la tête d’une congrégation, de prêtres du diocèse, avait été accueilli par le roi de Prusse avec une bienveillance toute particulière, et s’était mis, lui et sa congrégation sous la protection immédiate du roi. Ayant connaissance des ordres donnés par Sa Majesté, il fut dans son camp, à quelques lieues de Trèves. Il demanda une audience ; elle lui fut accordée sur-le-champ. Le bon roi le reçut avec la plus grande affabilité et lui dit : « Monsieur le curé, on me juge bien mal