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voitures publiques sont très chères. D’ailleurs, j’avais l’espérance de vendre ma voiture à Strasbourg. C’était une belle et bonne berline à ressorts anglais et je devais gagner sur le prix qu’elle m’avait coûté (15). Mon voyage fut assez heureux.

À Carlsruhe, mon mari trouva un émigré de sa connaissance, qui lui demanda où il comptait passer la frontière ? « Au pont de Kell. – Mais vous trouverez des difficultés. Allez à Radstadt dans telle auberge. Là on vous donnera toutes les facilités possibles pour votre passage. Vous y trouverez nombre d’émigrés. » Nous prîmes donc le chemin de Radstadt. On nous garda trois jours à l’auberge. Au bout de ce temps, on nous dit que nous partirions à la nuit. On nous conduisit par des chemins affreux jusqu’au Rhin. Là il se trouva une grande barque où on mit notre voiture. On attendit encore quelque temps sous le prétexte qu’on voyait des bleus de l’autre côté. Mais tout cela n’était qu’un jeu joué pour nous faire peur et nous faire payer davantage. Enfin on nous fit entrer dans la barque. Je ne fus pas maîtresse d’une espèce de terreur. La figure des bateliers était effrayante ; le Rhin était large dans cet endroit. Nous abordâmes à quelque distance du village. On nous conduisit dans une petite maison ; un souper nous attendait ; le