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introduction, § x.

du comte qui ne leur fera aucun mal, qui ne leur prendra rien, qui au contraire leur donnera du sien[1]. Mais voilà que le bruit se répand que cette invitation cache un piège, que l’évêque veut simplement assurer à Simon de Montfort des otages, et en même temps les Français déjà entrés dans la ville se mettent à piller. C’est alors que l’insurrection éclate, et qu’un combat s’engage sans succès marqué d’aucune part. Folquet reprend aussitôt son rôle de négociateur. Il réunit les habitants dans un faubourg de la ville, et réussit à les calmer, se faisant garant de la modération de Simon, affirmant, sous sa responsabilité, qu’ils ne seront inquiétés ni dans leurs personnes ni dans leurs biens, ceux qui ne se sentiraient pas rassurés pouvant se retirer librement. Le discours que le poète prête à l’évêque en cette circonstance[2] est un chef-d’œuvre de style doucereux et patelin. Les Toulousains se laissent persuader, le sire de Montfort prend autant d’otages qu’il en veut avoir, puis, malgré l’avis contraire de son frère et de quelques autres des siens, il traite la ville avec la dernière rigueur ; les habitants sont désarmés, un grand nombre expulsés, les remparts sont, au moins en partie, ruinés, et la ville elle-même est mise au pillage.

Dans toute cette entreprise, l’impitoyable général de la croisade a pour conseiller et pour appui l’évêque Folquet qui d’abord a su, par ses promesses fallacieuses, disposer les Toulousains à une sorte de capitulation, qui ensuite pousse Simon aux mesures les plus rigoureuses. Le vilain rôle attribué en cette affaire à l’évêque est-il de pure fantaisie ou s’y trouve-t-il un fond de vérité ? C’est une question qui

  1. Tirades CLXXIV et CLXXV.
  2. V. 5294-5340.