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introduction, § x.

Fauriel a reconnu le caractère essentiellement dramatique de cet épisode, dont il a su apprécier les beautés. Il s’est demandé ce qu’il y avait de réel, de véritablement historique. Question dont la portée dépasse le point même en discussion, car sur ce point, c’est-à-dire sur le concile de Latran, nous avons assez de documents pour contrôler, au moins dans une certaine mesure, le récit du poème, et par suite les conclusions obtenues, en ce qui touche cet épisode, pourront servir à une appréciation générale de la valeur historique de l’ouvrage.

L’appréciation de Fauriel est, en somme, assez judicieuse, bien qu’elle souffre du défaut de précision qui était habituel à ce littérateur. Mais nous allons voir qu’il s’est embarrassé dans une difficulté purement imaginaire, faute d’avoir su apprécier correctement les documents qu’il comparait. Il commence par résumer les décisions prises par le concile relativement au débat des seigneurs du Midi et de Simon de Montfort[1]. Il fait remarquer que dans les actes du concile « on chercherait en vain le moindre indice d’une délibération préliminaire, et moins encore d’une délibération dans laquelle se seraient manifestés des scrupules, des hésitations, des discordances entre les membres du concile. Le fait de ce concile se présente là comme dégagé de tout accident, de tout obstacle, de toute intervention, de tout intérêt autre que l’intérêt ecclésiastique. Il n’y est pas le moins du monde question de la présence ni des réclamations des seigneurs séculiers : tout ce qui les concerne dans une circonstance si grave advient et se passe comme s’ils n’existaient plus... Enfin, rien dans ces résultats officiels du concile ne laisse soupçonner, entre le pape et les prélats

  1. Voy. les textes cités ou indiqués, II, 193, n. 2.