Page:La Chanson de la croisade contre les Albigeois, 1875, tome 2.djvu/592

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
460
[1219]
croisade contre les albigeois.

nois, les approvisionnements, occupent les places, les jardins, les vergers, et le roi est descendu en sa tente au milieu de la joie générale. [9250] Quand ceux de la ville eurent reconnu le roi, ce n’est pas merveille s’ils furent éperdus. Chacun se dit en son cœur qu’il eût mieux aimé n’être pas né. À la première attaque les croisés leur ont enlevé les fossés et les lices, [9255] brisé et enfoncé ponts et barrières. Après ce combat on entra en pourparlers, et ceux de la ville se tinrent pour sauvés, car, de propos délibéré et d’après une convention arrêtée, le comte Centule et les siens se sont rendus au roi [1].

[9260] Dans le pavillon royal, resplendissant d’or battu, les prélats de l’église se sont assemblés avec le roi, et les barons de France s’assirent devant lui. Le roi s’est accoudé sur un coussin de soie, et plia son gant droit cousu d’or. [9265] Les assistants prêtèrent l’oreille aux discours les uns des autres, tandis que le roi semblait muet. Mais l’évêque de Saintes, homme intelligent, prend la parole au milieu de l’attention générale : « Puissant roi, voici que vous arrivent joie, honneur et salut. Du royaume de France vous êtes sorti, vous vous êtes mis en marche [9270] pour protéger l’Église et sa dignité. Et puisque vous gouvernez et conduisez sainte Église, l’Église vous mande — et gardez-vous de lui désobéir — de livrer au comte Amauri le comte [Centule] qui s’est rendu à vous, car c’est chose due, [9275] pour qu’il le brûle ou le pende. Votre devoir est de l’aider, comme aussi de lui livrer la ville et ses habitants, hérétiques notoires, sur qui le glaive et la mort se sont appesantis. » Le

  1. Le fils du roi de France, comme plus haut, v. 3139 et 8955.